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Arbre

Le Temps des Rêves

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 07/12/2012 18:49:14

Simplement envie de vous faire partager les textes dont je tombe amoureuse au détour d'un cours. Alors forcément, je les ai étudiés, disséqués, épuisés au lieu de les savourer bruts mais finalement, je commence à croire que c'est aussi une façon d'apprécier la littérature.
Argh ! Zinzo, qu'es-tu donc devenue ? Bref, bonne lecture...

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 07/12/2012 19:04:22

Grrr... les scans ça marche pas !
Ben pour ceux qui connaissent... Guignol's band, de Ferdinand Céline (mais c'est un passage précis et j'ai la flemme de le recopier maintenant.^^)


Bref, en attendant que votre serviteur ait cet effrayant courage que constitue le recopiage de trente lignes de textes, quelques petites idées éparses.

Vous l'aurez compris, je suis en plein dans Céline en ce moment et je suis partie avec les mêmes a priori que tout le monde. Eh bien, le Voyage et encore plus Mort à Crédit, c'est violent, dégueulasse, le propos est immonde, tout ce qu'on voudra et je ne dirais pas le contraire. Mais ce type est un génie du style ! Vraiment ! C'est juste fabuleux de pouvoir écrire comme ça et c'est ce qui (selon mon prof de français mais je partage entièrement son opinion) rachète tout le vomis qu'il a pu déverser. Certains passages de ses textes sont de la pure poésie, quand il se calme un peu sur les insultes. Dommage, je n'ai pas le texte pour le démontrer mais au moins quelques citations concernant sa vocation littéraire qui me parlent totalement.

"Ce qui ne chante pas n'existe pas pour l'âme - merde pour la réalité. Je veux mourir en musique pas en raison ni en prose."

"Le sauvage ne s'exprime pas sans poésie, il ne peut pas. Le civilisé académisé, s'exprime en ingénieur, en architecte, en mécanisé, plus en homme sensible."

"Resensibiliser la langue, qu'elle palpite plus qu'elle ne raisonne."

"On me reproche la cruauté systématique. Que le monde change d'âme, je changerai de forme."

Avatar de Wensaïlie Wensaïlie Mode Lecture - Citer - 07/12/2012 23:15:51

très bonne idée ! (je serais plus seule à parler de mes études :p)
j'aime beaucoup les citations que tu as mises ! Elles donnent à réfléchir !

Avatar de Azouras Lazuli Tintomara Azouras Lazuli Tintomara Mode Lecture - Citer - 11/12/2012 20:40:30

Intéressant aussi je dois dire Petit Sourire
Je ne manquerai pas, moi non plus, de vous faire par de mes travaux de recherche Clin d'oeil
J'aime beaucoup tes citations, en particulier la dernière qui me touche particulièrement, notamment en ce moment.
En tout cas, merci pour ce partage.

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 14/12/2012 20:51:42

Aujourd'hui : découverte du provocateur Paul Valéry, poète et critique littéraire du début du XXe siècle. Sa particularité ? Il est formaliste, c'est-à-dire qu'il nie la possibilité d'un "vouloir-dire" de l'auteur, d'un sens possible à trouver dans une oeuvre, pour ne s'intéresser qu'à la forme pure, l’artéfact littéraire. Il a entrepris de relire de grands auteurs français reconnus pour leurs idées (philosophiques ou religieuses) comme Bossuet... ou Pascal, parce que forcément, je viens de découvrir son point de vue sur ce philosophe, en niant le fond et en mettant en valeur l'aspect purement formel, le génie de la langue qui porte les idées dont il n'a que faire. Par exemple, le cultissime "Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraye." (Pascal) devient un poème parfait, dont il entreprend une analyse poussée et fascinante (qui lit Pascal de la sorte ?).

Vous me direz, au-delà de ma fascination d'hypo, ben y'a pas grand chose d'intéressant à partager. Mais c'est qu'il part de là pour développer toute une théorie de l'écriture, sur laquelle je n'arrive pas à me mettre d'accord : des pans plongent, selon moi, en plein coeur de mon expérience, d'autres me laissent indifférente voire me révoltent.
Par exemple, la forme doit-elle vraiment seule compter dans la lecture et l'écriture poétique ? Faut-il renoncer à saisir les idées de l'auteur, qui ne seront que des interprétations de notre propre subjectivité, de plus dépendantes d'un contexte culturel, d'une époque, d'un mode de pensée générationnel ?
Valéry traite l'écrivain de menteur, en particulier celui qui prétend se confesser dans son oeuvre. D'un côté, je ne suis pas d'accord parce que ça veut dire, en étendant, que le lecteur n'entre jamais en communication avec l'auteur, et qu'au-delà même de l'écriture, toute communication est impossible puisque chacun ment quand il se raconte. L'auteur serait duplice ; son texte une machine à fantasmer.
D'un autre côté, son point de vue me parle quand on l'applique à l'acte même d'écrire. Selon lui, dès qu'on écrit, on se dédouble : on pense à la réaction du public qui lira, et même dans le journal intime, nous jouons nous même le rôle de ce public. Résultat : choix de mots pour mieux exprimer ce qu'on veut dire, autocensure, mise en scène... Se raconter soi-même honnêtement semble impossible. Ainsi, il dit du désespoir que veut exprimer Pascal dans sa phrase :"Si je ressens que tout est vain, cette même pensée m'interdit de l'écrire." S'il y a écriture de la douleur, c'est que cette douleur quelque part n'est pas aussi forte, aussi remplie de désespoir que l'auteur voudrait le faire croire puisqu'il l'écrit ("vouloir que l'on prenne son industrie pour son émotion."Clin d'oeil.

Bref, je fourmille de questions... la vie est belle !^^

Avatar de Wensaïlie Wensaïlie Mode Lecture - Citer - 16/12/2012 22:13:20

(top comptage : la réponse en dix lignes)
Très intéressant, l'éternel combat sur la forme/le fond date décidément ^^ pour ma part j'ai décidé que lorsque j'écrivais c'était pour faire passer un message, une histoire, et que si possible la forme m'aidait, mais que je m'en souciais pas/peu/quand ça m'amusait.
"Selon lui, dès qu'on écrit, on se dédouble : on pense à la réaction du public qui lira, et même dans le journal intime, nous jouons nous même le rôle de ce public. Résultat : choix de mots pour mieux exprimer ce qu'on veut dire, autocensure, mise en scène..."
pour continuer à raconter ma vie, quand j'écris je me met à la place du ou des héros, et le public si j'y pense, il a bien de la chance... alors évidemment il ne devait pas avoir beaucoup de roman de SFF mais a-t-il prévu cette possibilité de se mentir à soi-même pour vivre des aventures et non dans le but (légèrement égocentrique) de vendre ses livres...?
(10 tout pile yeah !)

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 17/12/2012 16:59:27

Avant j'étais comme toi : le style au service de l'histoire. Point. Et si on case une jolie phrase, tant mieux. Mais la dissection littéraire à grande échelle ça vous change l'hypokhâgneux. Je réfléchis de plus en plus au style quand j'écris (autre chose que des poèmes parce que là, je le faisais déjà) et envisage de tester le "tout symbolique ou presque" en roman quand j'aurais le temps de me remettre devant une page blanche.
Quant à penser aux lecteurs, je pense que je me suis mal exprimée ou plutôt j'ai mal exprimé Valéry. Je ne pense pas qu'il fasse référence à la dimension lucrative (hem, on y croit) de l'écriture mais plutôt au fait que l'écriture est généralement un acte qui engage une lecture étrangère future, ne serait-ce que la sienne propre avec deux heures ou vingt ans de plus. Donc prendre la plume, c'est choisir parmi les milliers de mots qui pourraient exprimer ce que l'on veut dire et qui coexistent dans ton esprit et sceller ce mot là précisément et plus les autres. D'où cette précaution et le recul instinctif (en tout cas dans mon cas, ça marche) que l'on prend pour s'interroger sur sa réception.

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 19/12/2012 19:43:28

Question incongrue : savez-vos comment est né le concept du restaurant à la française ?
Personnellement, je ne m'étais jamais posé la question avant qu'on ne me donne la réponse (comme quoi, la géographie est "parfois" intéressante). Après la Révolution Française, les grands cuisiniers des familles aristocratiques se sont tous plus ou moins retrouvés au chômage puisque les nobles étaient en exil ou en pièces détachées. Du coup, pour gagner leur vie, ils ont eu l'idée de créer des établissements ouverts à tous (moyennant une forte somme) dans lesquels ils ont perpétué la tradition de haute cuisine initiée par le milieu aristocratique depuis des siècles...

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 19/12/2012 23:59:25

Ben moi non plus je ne m'étais jamais posé la question mais au moins j'aurais la réponse !

Avatar de Wensaïlie Wensaïlie Mode Lecture - Citer - 01/01/2013 13:03:45

"en pièces détachées".... XD

Sinon super intéressant ! Moi je pensais juste qu'un jour un mec avait dit "je vais faire un resto trop classe" et puis point barre :p

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 21/02/2013 21:49:28

Bon, dans un tout autre registre... un coup de foudre en plein devoir d'Anglais. Dommage qu'il faille en tirer un commentaire composé en deux heures.

Limbo

Fishermen at Ballyshannon
Netted an infant last night
Along with the salmon.
An illegitimate spawning,

A small one thrown back
To the waters. But I'm sure
As she stood in the shallows
Ducking him tenderly

Till the frozen knobs of her wrists
Were dead as the gravel,
He was a minnow with hooks
Tearing her open.

She waded in under
The sign of the cross.
He was hauled in with the fish.
Now limbo will be

A cold glitter of souls
Through some far briny zone.
Even Christ's palms, unhealed,
Smart and cannot fish there.

Seamus Heaney

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 21/02/2013 22:17:08

J'adore ce poème. Les sonorités de l'anglais, la tristesse du thème et la douceur du tout...


Ne vous privez pas du plaisir de chercher dans le dictionnaire (sur internet ou ailleurs), mais je sais que vous êtes tous de gros flemmards et personnellement je ne suis pas bilingue donc je vous met les mots que je n'avais pas saisis en spoiler, ça peut en aider certains, parce que ce poème vaut vraiment le coup d'être compris.


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Netted an infant : prirent un bébé dans leur filet
Spawning : "rejeton", enfant, progéniture
Shallows : les hauts fonds, le lieu de la plage où t'as largement pied
Ducking : pushing under the water
knobs : extrémité ronde de quelque chose
gravel = graviers
minnow : en gros, poisson (type carpe)
waded : avança difficilement dans de l'eau ou un liquide visqueux
hauled : tiré au loin (hameçonné)
limbo : les limbes
glitter : ensemble de choses brillantes et éparses
briny : salé
to smart = avoir mal, à la fin...

Avatar de Wensaïlie Wensaïlie Mode Lecture - Citer - 22/02/2013 13:39:22

J'avais compris un peu, avec les mots spoiler encore mieux, mais je ne suis pas certaine d'avoir tout pigé quand même ^^ cependant j'aime beaucoup l'histoire et le ton berçant de ce poème (comme des vagues?)

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 22/02/2013 21:32:28

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Tu pourrais corriger mes fautes quand tu m'exploite honteusement.^^

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 22/02/2013 21:43:44

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C'est fait Clin d'oeil
Remarque quand même que j'ai effectué des recherches complémentaires, minnow = poisson type carpe
Mais oui il faut l'avouer : le vocabulaire m'a été fourni par Zinzolin^^