Le Temps des Rêves

Tu veux que je sois franc.
Tu penses que je suis en colère.
Oui, je le suis.
Tu tiens vraiment à ce que je le montre.
Très bien voilà.
Oui je suis en colère.
Oui c’est de ta faute.
Non je ne m’arrêterai pas de gueuler.
Non je ne peux pas dire ce que je ressens.
La colère me bouffe les mots, me bouffe de l’intérieur.
Dégoût, déception, j’en sais rien et j’m'en fous.
Comment ce que tu m’as fait ?
Comme si t’en savais rien.
De plus c’est toi qui a demandé à voir ma colère,
Donc maintenant assume mon courroux.
Personne ne m’avait jamais autant mis en colère.
Incroyable.
Des excuses. Tu veux des excuses.
C’est la meilleure.
Oui j’ai envie de casser.
Soit le premier truc qui me tombe sous la main,
Soit moi, je me casse.
Lâche-moi le bras, les baskets, la tête.
Je pars me calmer.
Non je ne te dis pas.
Tu ne dis rien, je t’engueule et tu veux que je reste.
Qu’est-ce qui va pas chez toi.
T’as p’t'être l’impression qu’une tomate t’engueule,
Mais moi ça me gave.
…
Va chier raclure.
Plus jamais, tu m’entends, plus jamais.
Ne cherche pas à me joindre.
Adieu et à demain.

14/05/05
LANDES Mickaël

Texte écrit à l'origine pour "forcer" un élève à pousser sa voix et à montrer ses sentiments pour une comédie musicale

Bien joué ! J'aime beaucoup les sonorités, les tournures des phrases, le rythme général. Je ne sais pas si l'élève en question a réussit mais rien qu'en lisant ce texte, on a envie de "pousser sa voix". L'intention et les émotions viennent d'elles mêmes. Clap clap !

Je pense que l'effet est réussit ! (mais qu'en est-il de l'échantillon test? :p)
Il y a juste:
"Dégoût, déception, j’en sais rien et j’m'en fous.
Comment ce que tu m’as fait ?
Comme si t’en savais rien."
La répétition des riens que je trouve dommage. Mais après tout lorsqu'on est en colère on répète souvent les mêmes mots dans tous les sens jusqu'à ce que ça en devienne incompréhensible!
("Pas six! Pas six!!!" pour les initiés)

Super ! Je trouve que ça retranscris très bien cette émotion ! Surtout les expressions du genre "La colère me bouffe les mots, me bouffe de l’intérieur" qui illustrent bien le truc, et aussi les petites expressions sans beaucoup de contenu "c'est la meilleure" ou "incroyable" qu'on dit pour se donner une contenance (paradoxalement) quand on veut s'exprimer mais qu'on ne sait pas quoi dire...

Par contre du coup je trouve que les phrases un peu explicatives exemple :"De plus c’est toi qui a demandé à voir ma colère, Donc maintenant assume mon courroux." refroidissent un peu l'ensemble, c'est dommage, on aimerait que ça monte sans jamais redescendre ! (enfin si quand même à la fin.. )
En tout cas bravo ! (alors ça a marché ?)

Oui parce que le plus intéressant serait de savoir si l'oeuvre a atteint son but!

Et bien oui! Un peu à la façon de M. Keating. Par la suite j'ai "titillé" le gamin, je m'explique: je lui ai plusieurs fois fait lire à voix haute le texte de manière à ce que ça le saoule, puis il a du le lire à voix haute en s'appuyant contre un rebord de fenêtre de manière à utiliser des muscles de son corps (les jambes à 1m50 du mur et du coup ses bras appuyés sur le rebord l’empêchaient de tomber) et enfin pendant la deuxième lecture dans cette posture je m'amusais avec une règle à le gêner dans sa dictée/diction (sans jamais lui faire je vous rassure). Et au final il GUEULAIT le gosse! Il m'a remercié je ne sais combien de fois puisqu'il a continué à faire du théâtre et m'a invité à chacune de ses pièces.
Pour les parties qui ne collent pas il y a un but: "courroux" par exemple n'est pas un mot que les ados utilisent souvent mais il sera confronté dans les futurs textes qu'il apprendra à des mots qui ne sont pas dans ses habitudes. De plus les "r" sont mal prononcés quand nous sommes en colère, ils ne roulent pas assez (d'où la répétition des "rien".

Sans un élément de cruauté à la base de tout spectacle, le théâtre n'est pas possible.

Antonin Artaud

Cette citation prendrait-elle soudainement tout son sens ?

Ce me rappelle un film mais je n'arrive plus à mettre de titre sur les images.
La méthode a porté ces fruits dirons-nous...

Ah oui dis donc ! Bravo !

Le film ne serait pas "Le Cercle des Poètes Disparus"?

Bon, et bien avec un tel exercice je prendrais bien un cours pour pousser ma voix moi aussi.
J'ai eu également cette impression de "refroidissement" face aux phrases explicatives (le de plus m'a gênée) mais c'est franchement bien mené !

Haaa surement mais ça fait très longtemps que je ne l'ai pas vu alors je ne sais plus trop. Mais maintenant que tu le cites oui...

J'avais fait un autre texte pour bosser la timidité (ben oui faut jouer le timide mais il faut que le public entende tout de même!). S'il y a des demandes je le mets.

Fais donc voir !

Non je n’ose pas.
Arrête de me pousser.
J’irai à mon rythme.
Non ne l’ouvre pas, je vais le faire.
Laisse moi respirer, je me concentre.
T’as pas entendu un bruit. Non.
De toute façon on a le temps.
Les autres ne sont pas prêts.
Ils le sont… bon ben ils n’ont qu’à se taire.
C’est à moi qu’ils s’adressent…
Bon d’accord je me lance.
Mais d’abord je me concentre.
Je prends trois respirations.
Un.
Deux.
Trois.
Attend, attend.
J’ai failli m’étouffer.
Comment ça je suis lourd.
Non je n’ai pas peur.
Non ce n’est pas le trac.
Il y a du monde en face, non.
C’est pour ça.
Je ne veux pas rater.
Il faut savoir se faire désirer.
Cela risque d’être la dernière fois si je comprends bien.
Ecoute, ils parlent.
Ils ne sont pas prêts à m’entendre.
Tu penses qu’ils râlent toi ?
Eh, toi là-bas !
Lâche la manette.
Ça y est, le rideau s’ouvre.
…
Bonsoir.