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Arbre

Le Temps des Rêves

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 29/10/2017 12:06:14

Derrière la fenêtre aux volets colorés
Où l’autre a accroché son petit potager
Quand un vent hasardeux fait voler les rideaux
On surprend quelquefois

Des enfances lovées genoux contre poitrine
Qui sanglotent au milieu de ce qu’elles ont brisé
Des chambres inondées où rampent des anguilles
Des espoirs fatigués qu’on a cloués au mur
Pour ne pas qu’ils s’abîment dans l’obèse trou noir
Qui mange l’atmosphère avec un sourire vide

Le regard se rétracte il ne voudrait pas voir
La lourde porte en fer dont les battants rouillés
Tremblent sous les assauts d’une bête blessée
Les orgies qui se jouent entre désirs coupables
L’armoire à pharmacie pleine de boîtes vides
Les éclats de verre sale couchés dans la cuisine

Le regard s’écarquille il a mal il a peur
Qu’on le surprenne ici qu’on ne le surprenne pas
Il veut fuir mais il sent autour de sa cheville
Le doigt humide et froid de l’obèse trou noir
Il frappe il hurle il court en sentant la brûlure
Il est dehors, il pleure, il se recroqueville

Au bord de la fenêtre le potager est plein
D’un bouquet de fleurs jaunes que l’autre a fait pousser
Une menthe poivrée diffuse ses parfums
Qui ne sont pas moins vrais.

Avatar de MKL MKL Mode Lecture - Citer - 30/10/2017 14:11:23

Je ne sais pas trop pourquoi mais je n'ai pas du tout été pris par ce texte là, je ne trouve pas de rythme qui me sied et me perd dans les images. Je pense passer à coté de choses. Désolé

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 06/11/2017 18:55:46

Merci pour ton commentaire !
A l'origine c'était marqué "derrière la fenêtre du regard" : est-ce que ça t'aurait aidé ?
J'attends de voir ce que ça fait sur les autres pour avoir des pistes et éventuellement le retravailler

Avatar de MKL MKL Mode Lecture - Citer - 07/11/2017 18:55:55

Non ce n'est pas le titre qui me fait cela.

Avatar de Maggy Maggy Mode Lecture - Citer - 09/11/2017 13:15:32

J'ai lu.
J'avoue j'ai du mal à accrocher. Le contraste entre la première strophe et la dernière, généreuse, pleines de promesses et le récit, glauque, froid, triste,... ça m'a glacé le sang.
Je suppose bien que c'est voulu mais c'était trop pour moi et mon coeur fragile...
Du coup dans un sens c'est réussi comme texte car choquant je trouve et malsain un peu aussi. Mais je pense qu'il peut ne pas être apprécié pour ces mêmes raisons.
Je sais pas si c'est très clair, et je suis pas sûre que cela va t'aider.
C'est mon ressenti, désolée.
Bonne fin de journée.

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 09/11/2017 14:26:33

Merci pour cet avis ! Déjà, ça ne t'a pas laissée indifférente, donc effectivement dans un sens c'est réussi, même si ce n'était pas l'idée de départ.
A l'origine j'imaginais plutôt que la douceur de la dernière strophe viendrait effacer la glauquitude du milieu, je n'avais pas pensé que ça pourrait venir la souligner.

Avatar de poulix poulix Mode Lecture - Citer - 12/11/2017 10:24:51

Alors, moi, j'ai A DO Ré me prendre une baffe au bout du 6e vers.
Les 5 premiers vers sont très beau, mignons, jolis (et réussis) et tout à coup, paf, l'angoisse, les anguilles, le désespoir, le trou noir obèse (très puissant celui-là). Pour moi, ce contraste, c'est un coup de maître.

Avant de lire le titre que tu avais prévu, je n'avais pas vu le double sens. Moi, je t'imaginais, à ta propre fenêtre, regardant la fenêtre des voisins et te rendant compte que la vie n'est pas facile pour tout le monde (je schématise allègrement). Après avoir vu que tu voulais l'appeler "derrière la fenêtre du regard". j'ai compris que tu parlais en fait des yeux (le trou noir, c'est la pupille ?), de ce qu'on voit dans un regard qui a oublié de se cacher. C'est ça ?

En relisant, je me dis que c'est probablement au moment où tu dis "le regard", que le lecteur est censé comprendre que la fenêtre, c'est les yeux, mais je ne l'avais pas compris.

Dans cette strophe :
Le regard se rétracte il ne voudrait pas voir
La lourde porte en fer dont les battants rouillés
Tremblent sous les assauts d’une bête blessée
Les orgies qui se jouent entre désirs coupables
L’armoire à pharmacie pleine de boîtes vides
Les éclats de verre sale couchés dans la cuisine

... je pensais qu'il s'agissait de ton regard, non de celui de l'autre

Mais il est vrai que dans cette strophe, en étant attentif, on comprend que là, c'est le regard de l'autre :
Le regard s’écarquille il a mal il a peur
Qu’on le surprenne ici qu’on ne le surprenne pas
Il veut fuir mais il sent autour de sa cheville
Le doigt humide et froid de l’obèse trou noir
Il frappe il hurle il court en sentant la brûlure
Il est dehors, il pleure, il se recroqueville


Voilà, ça c'était pour le côté "compréhension" de la double image.

Sinon, j'en reviens au poème tel que je l'avais compris.
Je l'ai beaucoup beaucoup aimé, sans le comprendre pleinement, parce que je trouve que le rythme coule tout seul et que les images sont fortes sans être grandiloquentes et inhabituelles tout en visant juste.

coups de coeur particuliers pour :

Des espoirs fatigués qu’on a cloués au mur
Pour ne pas qu’ils s’abîment dans l’obèse trou noir
Qui mange l’atmosphère avec un sourire vide


Le doigt humide et froid de l’obèse trou noir
Il frappe il hurle il court en sentant la brûlure
Il est dehors, il pleure, il se recroqueville


Après, il y a quelques petits bémols :


Des enfances lovées genoux contre poitrine
Qui sanglotent au milieu de ce qu’elles ont brisé

j'aime l'image et le premier vers est parfait mais je n'ai pas bien compris pourquoi c'étaient les enfances qui avaient brisé quelque chose. Ne sont-ce pas plutôt elles, qui ont été brisées ?

Tremblent sous les assauts d’une bête blessée
Les orgies qui se jouent entre désirs coupables

--> j'ai trouvé qu'on allait un peu trop dans le registre "dark" avec les mots "orgie", "bête blessée", "désirs coupables". Ces mots, pour moi, sont issus d'un champ lexical étranger au reste du poème où, à l'inverse, tu arrives à dire la noirceur et la douleur sans sortir d'unvocabulaire quotidien, presque neutre (la boîte à pharmacie, classique, mais qui fonctionne très bien, par exemple). Tu vois ce que je veux dire ?


Quand tu parles de la cheville, ça m'a un peu perdue, par rapport au fait qu'on parle des yeux... ok, c'est une image, et qui marche plutôt bien... mais elle brouille un peu les repères, peut-être.

Enfin, j'aime beaucoup le fait qu'on retourne à la fenêtre après cette plongée dans les profondeurs. Pour moi, ça n'a pas rendu la scène plus glauque, ça m'a ramenée un rayon de soleil. Par contre, je ne suis pas tout à fait convaincue par la toute fin. Ce "Qui ne sont pas moins vrais" m'a donné le sentiment que tu voulais souligner, justement, le fait que tout n'est pas noir. Je trouve que ça vient en trop, ou pas de la bonne manière. A la limite, je m'arrêterais bien, juste, sur une image :

Au bord de la fenêtre le potager est plein
D’un bouquet de fleurs jaunes que l’autre a fait pousser

Avec, pourquoi pas, un retour aux rideaux du début qui pourraient assurer la transition dans les deux sens.
Ou bien jouer sur le côté que ça peut déborder de larmes, d'eau, quand il pleut trop (ça, c'est juste que j'ai eu cette image qui a fait flash dans mon esprit : je ne sais pas si c'est à prendre ou à laisser)

La "menthe poivrée" et son odeur, pour moi, fait un peu trop "les ptits oiseaux / les bonnes odeurs / la menthe de tes yeux...". (j'en use parfois moi-même, oui, je plaide coupable et accusatrice :-b) et viens rabaisser le niveau d'insolite des images précédentes.

Voilà voilà. J'espère que ce commentaire tartine pourra te donner quelques indications et te permettra de voir ce que tu peux faire. je viendrai lire la nouvelle version si nouvelle version il y a car j'aime vraiment bien ce poème !

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 12/11/2017 15:32:54

Content qu'il ait réussi à t'attraper

L'idée générale du texte est : le regard du narrateur surprend un univers sombre dans le regard d'une personne qu'il voyait jusque-là comme joyeuse et agréable (cette façade est symbolisée par la fenêtre) : le regard du narrateur voit des choses qu'il pense qu'il n'aurait pas dû voir dans les yeux de l'autre, le narrateur a à la fois peur que l'autre sache que son intérieur sombre a été découvert et à la fois peur qu'il ne le sache pas (car il devra alors faire comme si de rien n'était et continuer à s'adresser à la façade alors qu'il pourrait s'occuper de ce qu'il y a derrière), il ressort blessé de cette exploration. Pourtant, la partie de l'autre qu'il connaissait jusque là est aussi réelle que celle qu'il vient de découvrir.

L'obèse trou noir c'est juste une image d'un sentiment de vide, d'un vortex intérieur.

Du coup je vais réfléchir à mettre deux ou trois indices supplémentaires. Je suis d'accord pour tes critiques de champs lexical, j'avoue que j'ai un peu ramé pour réussir à prolonger cette atmosphère. Pour l'enfance qui a brisé des choses, j'aime bien l'idée que ce soit l'enfance qui a brisé des choses (et vu son attitude on comprend qu'elle aussi a été brisée) car cela implique une certaine culpabilité.

Merci pour cette lecture !