Le Temps des Rêves

Dans la rue au petit matin
Sur le vieux parvis de l’église
Il y a un sac de couchage plein
d’un corps abîmé qui respire
dont émerge seulement
une barbe sale.

Pour ne pas détourner les yeux
Je me raconte des histoires
Je regarde tendrement
le chaud duvet qui l’enveloppe
Et je me dis que c’est une chenille
endormie dans les bras de sa chrysalide

Dans la rue au petit matin
Un jour le cocon sera vide
Alors pour le supporter
J’imaginerai
Que les ailes ont poussé.

Je n'y vois rien de négatif. Au départ je trouve l'attitude un peu saloparde puis finalement c'est de la naïveté qui prend la place avec son bagage de poésie.

Merci ! Je commence à m'y habituer, mais je continue à trouver qu'il y a un truc qui cloche, ça me paraît trop haché ou trop brutal, je ne sais pas...
C'est vrai qu'au départ on peut se demander si le ton n'est pas un tantinet sadique...

Le premier sizain est n'est pas assez ponctué, tous les vers s'enchaînent, on s'essouffle presque. "Plein d'un corps..." est assez maladroit. Pour alimenter ton poème, je verrais bien un autre sizain parlant du sommeil, afin aussi de continuer la comparaison avec la chenille sereine dans son cocon. Renforcer aussi le regard assez dur dans le premier sizain, que la transition soit plus flagrante avec la candeur et la poésie des suivants. En tout cas l'idée est bonne !

Au plaisir de te lire

Merci pour ton commentaire ! Je retiens particulièrement l'idée de mieux développer l'image du sommeil... Je crois que j'y avais renoncé par flemme, en fait, parce que je n'avais pas trop d'idées pour la développer^^.

Je ne vois de négatif voire de mal sain dans ce texte... au contraire. Il possède une réelle force. Celle d'arriver à transformer les éléments les plus durs de notre société en quelque chose de léger et de fantaisiste. C'est frais, c'est beau et c'est fort.

Merci pour ce texte. Désormais quand je verrai un sdf allongé ainsi dans la rue, je m'imaginerai que c'est juste une chenille qui est en période de métamorphose, et qu'il attend de nouvelles ailes pour pouvoir voler dans une autre vie.

En fait ce n'est pas forcément très apparent mais ce texte est autant une dénonciation de la société (qui nous met sous les yeux des choses dures qu'on ne devrait pas avoir à supporter parce que ça ne devrait pas exister, et face auxquelles chacun s'adapte comme il peut) qu'une critique du narrateur, qui veut "ne pas détourner les yeux" mais qui pourtant s'invente des histoires et transforme la dure réalité qui devrait le faire réagir en quelque chose de beau et poétique qui lui permet de rester inactif sans trop s'en vouloir... C'est un mécanisme de défense efficace et c'est beau, mais ça reste une manière parmi d'autres de se voiler la face...

edit : du coup l'impression un peu "saloparde" de MKL au début n'est pas forcément si erronée que ça finalement^^

Nani, tu viens d'inventer le narrateur non-fiable en poésie, tu es trop fort !

Mêmes remarques que Jeff, sinon : la première strophe n'est peut-être pas assez ponctuée et elle me paraît un peu bancale au niveau du rythme ; cependant, le reste du texte ne me dérange pas, je le trouve très bien, tant au niveau de la syntaxe que des images évoquées.

Joli texte l'émotion passe bien je trouve juste barbe sale qui a sonné étrange quand j'ai lu la première fois

Je suis d'accord pour le côté haché mais en même temps, ce souffle me dérange et participe à l'ambiance du poème. Tu peux en faire une force : ça semble tout mignon, quand tu arrives à la fin, pourtant tu gardes cette impression malsaine créée par la difficulté d'expression du narrateur. Ce n'est pas forcément un mal que ce texte soit dur à avaler.

Comme Brumepin, je ne trouve rien de malsain dans ce texte. Ceci dit, si certains trouvent quelque chose de malsain et en retirent quelque chose, tant mieux.
Je le trouve à la fois doux et dur, à la fois naïf et lucide.
Pour ce qui est d'une critique constructive :
*personnellement, j'ai beaucoup aimé "barbe sale" qui ne m'a pas du tout dérangé
*pourquoi pas, en effet, développer la question du sommeil. Cela permettrait notamment à la dernière strophe de ne pas arriver trop vite car, pour moi, elle arrive trop vite. On a à peine intégré l'image de la chenille et de la chrysalide que, déjà, le papillon n'est plus là.
*J'enlèverais le "Et" dans "Et je me dis que c’est une chenille". Cela résoudrait pour moi le problème de rythme que j'ai eu à la lecture.

En espérant que ces remarques te soient utiles !

Elles le sont ! Merci ! (Pour le "et", j'y réfléchis)

Je trouve ce texte excellent. Ce qui pourrait paraître un peu brutal, c'est ce qui donne de la puissance au texte. Surtout ces deux vers: Il y a un sac de couchage plein / d’un corps abîmé qui respire. J'aime beaucoup le "qui respire" parce que dans l'image que tu décris, ce n'est pas logique que ce corps respire. Le reste du poème est beaucoup moins haché et brutal et ça va très bien avec les pensées du narrateur. Vraiment, j'aime beaucoup ce poème. J'aime les poèmes qui parlent de la rue et de ses habitants en toute simplicité. Merci !

Merci pour ton commentaire !

J’ai bien aimé à la lecture tout en trouvant un petit côté bancal que je n’ai pas compris. Et puisque tu demand(ais) de la critique, je me suis défoncée pour analyser ce que j'avais ressenti ^^



=> je suis d’accord que plus de ponctuation pourrait rendre fluide et en même temps je trouve que là ça s’enchaîne bien, parce que c’est le matin, on claque un peu des dents dans le froid, etc.


=> j’adore ces deux vers, ce sont eux qui m’ont séduite et fait entrer dans le poème.


=> j’aurais supprimé ces deux vers qui paraissent déséquilibrer la strophe. Par ailleurs, je trouve dommage de parler de la barbe qui va casser l’image de la chenille (une chenille avec une barbe ?) et je trouve qu’on a compris sans avoir à ajouter ce détail. Si toutefois on laissait ces vers, alors je pense qu’il faudrait qu’ils soient plus longs.


=> je trouve ces deux vers ambigus… en fait en se racontant des histoires, il détourne les yeux d’une certaine façon. Donc ici, on voit bien que le narrateur essaye de se leurrer lui-même. Et en même temps, je me demande si ce n’est pas trop compliqué (ou pas assez développé) et que du coup ces deux vers ont trop de force vis-à-vis de la suite. Par ex « Pour oublier, je me raconte… » sonne comme un raisonnement plus fluide. Après c’est à voir selon tes attentes.


=> pourquoi pas de maj ?
J’enlèverai ces deux vers, je me dis qu’aller plus à l’essentiel rendra le mirage plus précieux et accentuera la cassure vers la naiveté. De plus l’illusion est que le sdf soit chenille dans une chrysalide, et c’est une belle image. Si tu parles du chaud duvet, le narrateur va jusqu’à se convaincre que le sdf est confortable. Or je trouve que ça fait une sorte de double aveuglement qui fait perdre de sa force à la chenille (je sais pas si je suis très claire)


=> pourquoi pas de maj ? (j’ai du mal à voir les bras d’une chrysalide mais pourquoi pas ^^)


=> j’aime bien cette fin. Peut-être mettre un point à vide (et que ce soit le premier du texte ?) et enlever le « Alors » qui est d’ordre démonstratif et n’apporte pas grand-chose sémantiquement je trouve.