A côté du p’tit ascenseur
Que personne ne prend jamais
Y’avait ce type avec une fleur
Qui souriait d’un air niais
Tout le monde lui passait devant
En voulant avoir l’air de le trouver normal
Il regardait en souriant
Tous ces gens solitaires qui partaient au travail
Et si vous preniez l’escalier
Un peu glauque un peu monochrome
Ce vieux pirate sur le pallier
Ronflait comme un aérodrome
Tout le monde lui passait devant
Comme s’ils ne sentaient pas qu’il puait l’épave échouée
Et il rêvait en souriant
Au parfum de la mer et de la liberté
Ah c’est bizarre, c’est bizarre ce pays
C’est un peu triste tous les gens tristes qu’on croise ici
Ah c’est étrange, c’est étrange cet endroit
Mais je m’y sens un peu chez moi…
A peine arrivés dans la rue
Sur le trottoir de macadam
Un enfant avec l’air perdu
Appelait maman les madames
Tout le monde avait l’cœur fendu
Mais détournait les yeux, accélérait le pas
Tout le monde avait l’air perdu
Mais tout le monde voulait croire qu’il ne l’était pas…
Ah c’est bizarre, c’est bizarre ce pays
C’est un peu triste tous les gens tristes qu’on croise ici
Ah c’est étrange, c’est étrange cet endroit
Mais je m’y sens un peu chez moi…
Tu ne fais pas vraiment dans le soleil et les petits oiseaux, en ce moment... Ton poème fait mal (c'est peut-être aussi pour ça que j'ai mis du temps à le commenter)... Je les vois, tous les jours, les gens tristes et les vieux pirates. La dénonciation marche si bien parce que, justement, tous les citadins (tous ceux, même, qui ont déjà été dans une grande ville) ont été confrontés à ce problème, ont eu à réagir (même si cette réaction est l'absence de réaction)... Ce qui ne marcherait pas aussi si, par exemple, tu dénonçais les tueries de Boko Haram, auxquelles nous ne sommes pas confrontées. Tu obliges ceux qui veulent les garder fermés à ouvrir les yeux...
J'aime bien la forme de ton poème, les vers assez courts, qui évitent de lui donner trop de lourdeur (le sujet en a déjà assez), mais avec de temps en temps un alexandrin qui vient quand même assener le message de tout son poids.
Il commençait bien, en plus, dès la première strophe tu nous parles de fleurs et de sourires niais, moi je m'attendais à un petit poème tout mignon, tout joyeux, tout léger, celui qui donne du du baume au coeur et fait oublier ses chagrins. Et ben non ! Et le contraste marche bien, je trouve. Il faut un petit peu de temps pour être sûr de comprendre, parce que qu'on (enfin moi) ne veut pas comprendre, je voulais faire comme les gens tristes, comme s'il n'existait pas, comme s'il s'agissait d'autres choses... Et si les deux strophes suivantes ne parviennent pas à nous convaincre, si on ne veut pas se laisser convaincre, la quatrième strophe du poème est suffisamment explicite.
J'ai tout de même une question : qui parle en italique ? A la première lecture, j'y ai vu le regard du clochard. A la deuxième ou troisième lecture, je me suis demandé si ce n'était pas celui du poète (enfin, de l'instance poétique) qui pourraient aussi être une seule et même personne. Le clochard fait-il partie des "gens tristes qu'on voit ici" ?
Bon, encore une fois, merci pour ton poème. Tu as publié trois poèmes bien différents, que j'aime tous les trois pour des raisons tout aussi différentes.
Tu ne fais pas vraiment dans le soleil et les petits oiseaux, en ce moment...
Tu as remarqué, toi aussi ?^^
A propos des passages en italique, l’ambiguïté est voulue (enfin, j'ai vu qu'elle y était, et je l'ai laissée là) et je suis content que tu l'aies trouvée. Au moment de l'écriture je l'avais plutôt pensée comme la voix de "l'instance poétique" mais j'aime bien le doute qui subsiste.
Je réfléchis encore à quelque chose à dire car je suis un peu perdu.
Juste
"Tout le monde avait l’cœur fendu
Mais détournaient les yeux, accélérait le pas"
pourquoi "-aient" à détourner?
J'aime beaucoup cette comptine. On a tous déjà vu "ce type avec une fleur". En tout cas, il ressemble à un homme que je croise depuis des années là où j'ai grandi. Il y a un vers qui m'a gêné: En voulant avoir l’air de le trouver normal C'est un peu lourd comme formule "en voulant avoir l'air".
Et la fin de la comptine... On s'y attend pas et c'est excellent. Terriblement angoissant je trouve. J'ai eu l'impression d'être de retour à Paris en lisant ton poème.
Merci pour ton commentaire ! "En voulant avoir l'air" c'est vrai que ce n'est pas super heureux comme formule, mais ça dit bien ce que ça veut dire. Je ne vois pas trop comment reformuler...
Oui, comme tu dis, ça veut dire ce que ça veut dire ><. Effectivement c'est pas facile de reformuler.
J'aime bien aussi cette petite comptine. J'ai cependant eu quelques problèmes au niveau de la rythmique, notamment la "vouloir avoir l'air de trouver ça normal", relevé par Dahij. Je comprends bien qu'il est impossible d'exprimer autrement toutes les nuances de cette phrase mais, est-ce que tu ne pourrais pas tenter un "en faignant de le trouver normal" ou "en se persuadant de le trouver normal", ou "en voulant faire comme si il le trouvait normal" (bémol pour celui-ci à cause du "si il"
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suite...
"Comme s’ils ne sentaient pas qu’il puait l’épave échouée" --> même remarque. Pour celle-ci, je suis sûre qu'il y a moyen de trouver une autre formulation qui soit moins longue et briserait moins le rythme. Qu'en penses-tu ?
Je comprends l'effet bizarre que ça fait à la lecture, mais j'ai écrit ce texte avec une musique en tête et de la manière dont je l'imagine chanté j'aime bien ce rythme là. Il faudrait que je fasse sortir la musique de ma tête pour la partager, mais malheureusement je crois que ce n'est pas pour demain^^.