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Arbre

Le Temps des Rêves

Avatar de Thaumiel Thaumiel Mode Lecture - Citer - 10/09/2012 20:57:56

Je suis très troublé en cette période, j’ai discuté avec mon vieux psychiatre, le docteur Hartman, il me semblait que j’étais arrivé à un tournant, je voulais savoir ce que j’avais et pourquoi je voyais un psychiatre et je prenais des médicaments.
- Mais je suis quoi exactement ?
- Ça n’est pas très important que vous le sachiez, et puis je n’aime pas ranger les gens dans un tiroir avec une étiquette…
- Mais encore…
- Vous êtes éventuellement borderline…
Ça ne me disait rien. Borderline, je trouvais juste ça joli. J'aime bien le vocabulaire de la psychiatrie. Maniaco-dépressif, mélancolie délirante, hystérie, etc, même si ces maladies ne doivent pas être faciles à vivre, les noms sont beaux. Je suis passé au supermarché acheter des steaks de thon, et au magasin Picard prendre une purée de légumes.
Borderline.
J’étais curieux.
Evidemment, j’ai fait comme tout le monde. Il était 17H00, je suis descendu au cyber-kawa, j’ai tapé borderline sur le moteur de recherche Googoo. Il y a un groupe de hard-rock tchèque qui s’appelle Borderline. Un groupe polonais aussi. Une chanson de Madonna et puis, je suis tombé sur un site de psychiatrie, puis d’autres. J’ai copié ces sites. Il était question de trouble de la personnalité limite (en anglais, borderline personality disorder, très, très joli), ou d’état limite.
Et j’ai lu.
Je ne sais pas.
Je ne sais pas si vous avez lu des documents de psychiatrie. On alterne entre des réactions du type "C’est tout à fait moi, ça" et "Mais je ne vois pas en quoi ça me concerne". J’avais pris quelques notes. J’ai lu d’autres textes concernant la psychiatrie sur l’encyclopédie en ligne, l’article sur les psychoses, sur l’apragmatisme, sur les névroses, sur les troubles dissociatifs, des choses comme ça. J’étais dans un océan de notions abstraites. J’ai posé des diagnostics sur pas mal de gens que je connaissais - à peu près tout le monde - il y avait des gens qui souffraient d’apragmatisme notamment, j’ai même reconnu une hystérique,

A toi ma folle de ma salpêtre, hier
Le fond plat de ton araignée interne mandibule
Sur mes diagnostics improbables de
Mes mots dansent et valsent dans les nasses
De mes pensées prisonnières de
Non, non, je n’en dis pas plus, pas de tiroir ni d’étiquette
Joyeux Noël et bonne famille passée en soirée
De mon côté purée de panais et steak de thon
Sûr, je l’ai
J’attends nos demains


J’avais faim, mais pour Noël, il faut manger un peu plus tard, vers 22H00, mettons, je ne sais plus si c’est ce Noël-là mais j’ai relu des textes.

la battaglia
eh oui, le sens de la vie risque bien d'être dans la bataille
dans le combat
physique
ama la vita come la battaglia
e la morte come un baccio
Syracuse,
Des murs à écrivains hooligans
armées de pollueurs nocturnes
poètes bottés
Soldats sans ennemis dans une ville balayée par la tempête
La leçon suivie si ce n’est apprise, d’un Art total
La ville comme surface,
d’inscription,
d’agression,
de transgression
murs souillés par la pisse

de poètes qui vomissent leur texte
comme ils vomissent la poésie
espérant ne pas finir la nuit
que ce soit la dernière


J’étais dans un océan de notions abstraites.

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 10/09/2012 22:16:30

J'aime beaucoup ! Je trouve que le style est simple, tu n'en rajoutes pas, et pourtant cela suffit pour me porter d'un bout à l'autre du texte (pour tout dire j'ai cliqué sur marquer comme non lu après deux lignes et puis finalement de deux lignes en deux lignes j'ai tout lu). j'ai été très surpris par le premier passage en vers, auquel je n'ai quasiment rien compris mais qui m'a vraiment charmé. Seul point noir, la fin : j'ai été un peu déçu dans la mesure où la conclusion plus ou moins suicidaire m'attriste forcément, alors que je m'étais attaché au narrateur (narratrice ?), et puis me surprend parce que je ne m'attendais pas à ce qu'il en arrive à ce genre de pensées alors que jusque là j'avais plutôt ressenti de simples interrogations, un peu de détresse certes mais teintée de beaucoup de délicatesse. Mais bon, ce qui me déçoit vraiment dans ta fin c'est le côté insistant, l'utilisation de "pisse" par exemple : c'est le seul passage où j'ai l'impression que tu forces ton récit, que tu en fais plus que nécessaire. Je pense qu'une fin du même registre mais moins insistante (deux fois vomir, reformulation de "ne pas finir la nuit" en"que ce soit la dernière"Clin d'oeil et en enlevant "pisse" m'aurait plus touché et pas forcément moins choqué.

Merci !

Avatar de Thaumiel Thaumiel Mode Lecture - Citer - 11/09/2012 13:58:58

Au retour du travail, je vous fais une lecture exégétique de ce poème !
Il parle d'une femme que j'ai aimée.
La fin n'est cependant pas suicidaire. Le texte s'inscrit dans une suite de textes (que je pense à publier peut-être...). Toutefois, je comprends ton raisonnement !
Je vais revoir le vocabulaire et te fais parvenir un prochain commentaire.

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De rien ! C'est bien la première fois qu'on me remercie pour un texte, j'en reste pantoise.
PS : narratrice. Je n'aurais pas gardé l'anonymat bien longtemps...

Avatar de Thaumiel Thaumiel Mode Lecture - Citer - 11/09/2012 14:04:19

murs souillés par la pisse => urine, liquide excrémentiel, pipi ? Urine pourrait coller... Je tiens à garder cette image.


de poètes qui vomissent leur texte
comme ils vomissent la poésie => débectent, éructent ?
espérant ne pas finir la nuit
que ce soit la dernière

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 11/09/2012 14:39:36

L'urine, je trouve que ça passe plutôt bien. Mais la critique de "pisse" n'est que mon avis personnel, si ça se trouve il y en a qui trouveront ça bien le changement de vocabulaire !
Pour les deux vomir... je n'ai pas trop d'idées à part supprimer un vers (quitte à le remplacer par autre chose) mais si tu veux garder les deux autant laisser comme ça je pense plutôt que de chercher un synonyme.

Avatar de Thaumiel Thaumiel Mode Lecture - Citer - 11/09/2012 14:56:12

A toi ma folle de ma salpêtre, hier
Salpêtre, hier, la Salpêtrière, le fameux hôpital parisien où officiait Charcot pour le traitement des hystériques et dans lequel va travailler le jeune Freud, c’est là où Freud commence à jeter la première ébauche de la psychanalyse (après avoir essayé l'hypnose).
Le fond plat de ton araignée interne mandibule
Le fond plat : cette fille était morose, elle était belle mais avait le regard éteint, un cerveau plat, elle ne pensait pas, elle ergotait, elle n'aimait pas, elle calculait... une finlandaise que j'ai aimée et qui m'a trahie. L'araignée au plafond fut ma "folie" donc, une folie douce, "mandibuler"... Je crée ce verbe, comme ça, ça doit bien dire ce que ça veut dire ! Mâcher des mandibules, ses mandibules d'insecte nuisible finlandais.
Sur mes diagnostics improbables de
Des diagnostics, j'en fais aussi, de la psychopathologie de la vie quotidienne.
Mes mots dansent et valsent dans les nasses
J'aime la danse, contemporaine !
De mes pensées prisonnières de
Non, non, je n’en dis pas plus, pas de tiroir ni d’étiquette
Une phrase de mon ancien psychiatre qui m'aimait pas ranger les gens dans des tiroirs... Vous êtes ceci, vous êtes cela... Les tiroirs sont des cache-sexe, des "parlez devant l'hygiaphone".
Joyeux Noël et bonne famille passée en soirée
De mon côté purée de panais et steak de thon

Authentique, un soir de Noël j'ai mangé ça, je mange peu !
Sûr, je l’ai
Ben, surgelé...
J’attends nos demains
Il y a toujours un vivace espoir...

Avatar de Wensaïlie Wensaïlie Mode Lecture - Citer - 04/11/2012 12:27:25

J'ai beaucoup aimé ce texte, simple, prenant, bordline (trouble de compréhension limite ^^), tu passes d'un sujet sérieux (la psychanalyse) à un autre (le thon) et tout ça naturellement, et les deux passages centrés sont délicieusement pas clairs voir absurde, mais pourtant ça ne m'a pas fait décrocher.
Par contre je trouve la fin est un peu sombre par rapport au reste du texte et c'est dommage Petit Sourire

Merci Petit Sourire

Avatar de Thaumiel Thaumiel Mode Lecture - Citer - 08/12/2012 08:29:54

Merci Wen Grand Sourire

Avatar de poulix poulix Mode Lecture - Citer - 08/12/2012 10:17:20

Ah ! j'aime !
J'aime particulièrement, comme Wen, le mélange de psychiatrie et de Picard surgelé.
Et, le passage sur le fait que les noms psychiatriques sont beaux m'a percutée. C'est de la poésie à l'état pur ça : aimer les sonorités du nom d'une maladie !
J'ai été décontenancée par la fin mais je pense que ça va plutôt dans le sens du texte donc ça ne m'a pas dérangée.
(et quand à moi, l'utilisation du mot "pisse" ne m'a pas du tout dérangée)

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Et ça me perturbe parce cette histoire de tiroir, de personnalité et d'étiquette se trouve dans un de mes textes ^^ (tu me diras, ce n'est pas forcément très original mais ça me perturbe quand même ^^

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 09/12/2012 22:04:38

J'ai adoré ! Même quand tu n'écris pas en vers, c'est de la poésie du début à la fin et je l'ai lu sans effort, portée par tes images et l'étonnement de chaque rebondissement de pensée. Je suis moi aussi touchée par cette idée de la beauté des noms de maladies psychiatriques et tes passages en "vers" sont géniaux, délicieusement perturbants et fous.
Je rejoins les autres pour la chute. Mais ce n'est pas le vocabulaire qui me gêne, plus la cassure sans pré-avis avec la légèreté (bien que ce soit sombre aussi, je ne le nie pas) de ce qui précède. Comme dit Nani, je trouve que là, tu forces ton style alors que tu n'en as pas besoin.

Avatar de Thaumiel Thaumiel Mode Lecture - Citer - 15/12/2012 09:41:10

Poulix, tu as un lien vers ce texte ? ^^