Le Temps des Rêves

Il marchait sans but, aveuglé par la pluie.
Les pas dansaient sur un asphalte noir, plumes de cuir baignées dans une encre solide.

Il marchait…
Et se réveilla confus dans le transept d’une église, sous un visage de pierre.

Il bruinait plus fort encore, sous les voûtes anciennes, que sous les nuages dehors, ces créateurs de fleurs sauvages. Il ferma les yeux. Lentement, il senti le cri de la faim l’envahir. Celle du monstre sans visage qui s’était toujours joué de lui chaque jour de faiblesse. Le gouffre menaçant qui vivait au creux du ventre. Mais la vague des sanglots cette fois-ci asséchait la soif. Son antre était submergée par des flots ininterrompus, le néant n’avait pas sa place ici. Pas en ce lieu. Plus en cet homme.

Lumière.
Yeux ouverts.

Les murs étaient si hauts, géants de pierre. Des hommes qui avaient prié Dieu par le burin et la masse posaient leurs mains de calcaire sur son épaule fragile. Force et compassion d’un peuple disparu. Amis sans âges, merci.
Une bougie s’était éteinte, à quelques mètres de là. En un geste tremblant, il cueillit donc une veilleuse et sans aucune prière l’alluma de ses yeux brûlants de sel. La flamme fragile n’illumina rien, hormis des doigts très pales. L’odeur du cierge éteint raviva une pensée.

Il referma les yeux et écouta le silence.
Le silence murmura sans aucun mot ceci :

« Va dehors. Va.
Piétine le ciel bleu et éclabousse l’asphalte. Profite de la pluie pour remplacer tes larmes.
Peints avec moi des tulipes trop rouges, et mange dans l’avenir des fleurs de cerisier. Embrasse cette vieille dame qui ressemble à tes ancêtres, et murmure lui les mots d’amour de tous ses vieux amants. Oublie tous les chemins et court dans les ronces : les pierres seront tes jambes, elles rouleront pour toi.
Va dehors, va… Ton néant, tu l’as tué en te changeant en Homme.
Même si tu ne le savais pas.
Ris, sanglote, hurle.
Mais va dehors !
Va… »

Sur un bord de trottoir, une étoile filante.
Vert fluo, flottant dans une flaque bleue.
Elastique d’enfant.
Tellement irréelle qu’il éclata de rire. Et ce rire salé submergea les passants.

Un homme marcha longtemps, jouant du bout des doigts avec un élastique coloré, les yeux rougis, dans un monde de vapeur et de saphir où ciel et pierre se confondaient sans fin.

Un homme marcha sur des nuages en remerciant les anges de lui avoir ouvert leur chœur.

Beau, ce texte est beau ! Sûrement parce qu'il est infiniment toi ...

Mes coups de cœur :

J'aime beaucoup, beaucoup ! On dirait un rêve.
La dernière phrase m'a un peu dérangé dans la mesure où le personnage s'était assez terrestrisé et que j'aimais bien ça...

Bon, j'espère ne pas perdre ce que j'ai écrit à nouveau! Alors, j'essaie de me souvenir ce que j'ai dit, tout d'abord, je dois dire que je n'aime pas les textes qui débute par il/ elle, car on peut utiliser L'homme, l'enfant, le monstre, etc.
Sinon, j'ai trouvé certains passages très fluides, d'autres non.
Il y a une chose que je n'arrive pas à retrouver.
Sinon mon passage préféré est
Et j'aime bien la façon dont tu as joué avec choeur.

Moi je trouve ça cool de commencer par "il" et non "l'enfant", "le monstre", etc., parce que justement ça nous laisse le doute et c'est à nous de nous créer un sens à ce il ou de le découvrir petit à petit.

Je... j'adore...

Je pourrais citer à peu près tous les passages. Il respire l'élan ce texte, il respire la projection vers l'ailleurs. Il respire, tout simplement. Et il brille. Il y a tant de lueurs différentes...
C'est beau. Juste beau.


Cette phrase, elle fait jaillir une image que je ne comprends pas et qui est d'autant plus belle. C'est flou et "présent" à la fois.



j'adore, j'adore juste (étonnant me direz-vous ^^)


et une dernière pour la route parce qu'elle a une force poétique assez phénoménale : . Un rire qui submerge des êtres, assez fort pour être substance...

Les mêmes gros coups de coeur que Lune (coïncidence ? Je ne crois pas^^)
Et puis surtout le discours, cette injonction... Elle est pur don de puissance, même si elle semble cruelle. Elle va au-delà.
Je suis vraiment très fière de toi.

Wouah !
Je ne peux que rejoindre les autres : je trouve aussi que l'on reconnaît ta patte dans ce texte, un mélange de pierre et de couleurs, avec des petites touches légères au milieu du ton grave. J'aime les images inattendues que l'on ne comprend pas toujours très bien, cette fin pétillante qui m'a prise au dépourvue... Et comme Tinto et Poulix, j'ai adoré le discours du silence !

Seule critique, c'est vrai que la phrase de fin est un peu de trop. Je l'aime beaucoup mais je trouve cela dommage de conclure ainsi après l'originalité de ta chute.
Et je suis pour les pronoms qui commencent un texte, quand ce n'est pas gratuit. Pour moi, c'est un moyen de montrer que le nom ou le statut du personnage importe moins que ce qu'il a vécu et va vivre, et aussi un moyen de le rendre encore plus universel.

Et "l'être" alors? Enfin, je sais que pour moi, ça ne passe que lorsque le il est pour il était une fois, mais pas pour un protagoniste! Après, tous les goûts sont dans la nature

Cette phrase m'a assassinée :


j'ai beaucoup aimé ce texte (même si je pense pas avoir tout compris) ! l'ambiance, les sentiments... et la description de l'architecture (on ne se refait pas).
Le seul truc qui m'a gênée : le mot fluo, qui m'a fait l'effet d'un parachute : ton texte est sans âge jusqu'à ce qu'on tombe sur ce mot. Perso j'étais parti au MA... donc bon ^^'

Moi aussi, pfiou.
Ca fait du bien, ça touche, ça marque.
Je suis d'accord avec nani, on dirait un rêve, ça fait dix minutes que je suis scotchée
Merci !

Merci d'avoir fait remonté ce sujet ! (part méditer sur la phrase)

Aaaaah mon dieu mais qu'il est beau ce texte ! Je ne m'en remettrai jamais ^^
Pour le fluo, j'avoue qu'il est innatendu mais je l'aime bien dans ce caractère "improbable" ^^

Du coup, Wen, tu m'as fait le relire. Et il est toujours aussi magique ! Même différemment de la dernière fois...