Le Temps des Rêves

Scissipare

Coupez un vers en deux, brisez-le de vos mains
Humbles et recueillis, sacrifiez au soleil
Un brin de poésie tout brûlant d'incertain
La plaie doit être vive, ne le ménagez pas
Et si le monde veut, qu'il se penche et qu'il pleure
L'eau de pluie est un livre si le coeur s'émerveille
Fou comme est le poète, il chercherait l'auteur.
Incisez le bonheur, il cicatrisera
Coupez une aile à l'ange, l'ange s'envolera
Tuez donc un oiseau vous ferez crier l'air
Laissez le vent pour mort, face contre la terre
Mordez dans son oreille, ou crevez-lui les yeux
D'une graine de baiser la musique fait un feu.
La mort défait ses noeuds, soulageant les hivers
Plantez une âme en peine, ses larmes seront mères
Plantez un vers brisé, il en poussera deux.

J'adore ! L'idée, la réalisation ! Le rythme emporte, les images jaillissent !

Je n'ai pas compris/aimé ces vers :
"Fou comme est le poète, il pourrait y lire l'heure."
"D'une graine de baiser la musique fait un feu"
"La mort défait ses noeuds, soulageant les hivers"
"Plantez une âme en peine, les larmes seront mères"

Et ma foi, la lignée complète à ce charme de la longueur qui permet une gradation plus puissante ...

Mais la première partie en plus peut aussi être un poème à part entière ...

Les trois architectures sont possibles

Content que ça te plaise, Lune !

Pour les vers :

"Fou comme est le poète, il pourrait y lire l'heure"-->moui à y réfléchir ce n'est pas forcément très heureux, mais le sens c'était qu'il pouvait lire l'heure dans le livre de la pluie (le but était de créer un truc un peu incongru : le poète peut lire dans un livre, je cherchais quelque chose qu'on ne s'attendait pas à ce qu'il lise)

edit : j'ai remplacé par "fou comme est le poète, il chercherait l'auteur". J'espère que c'est un peu mieux...

"D'une graine de baiser, la musique fait un feu"-->Un baiser sur une belle musique... Sinon pour l'image plus abstraite j'imaginais la musique assise en tailleur en train de s'allumer un feu avec une graine de baiser (pourquoi pas ?^^)

"La mort défait ses noeuds, soulageant les hivers"--> imagine une looongue corde à noeud, chaque noeud est une vie, certains noeuds agonisent, et la mort les soulage (soit que c'est l'hiver qui les fait mourir soit "hivers" désigne les années portées comme un fardeau, que la mort soulage).

"Plantez une âme en peine, les larmes seront mères"--> c'est un poil maladroit ; je veux dire par là que de chaque larme il naîtra quelque chose : un chagrin, un amour, une sensation, une révélation, un brin d'herbe, que sais-je...

Je réfléchis pour éventuellement retravailler mais c'est dur...

J'adhère tout autant! Ca marche superbement bien, sauf (et oui ^^'):
"vous ferez crier l'air" je trouve que c'est trop dur à dire.

Moi aussi j'adore ! Le résultat est envoûtant, foisonne d'images inattendues. Les sons qui reviennent, le rythme de l'alexandrin, loin d'être lourds pour une fois, participent au charme. J'ai l'impression d'une espèce de recette magique...
Je n'ai pas bloqué sur les vers que tu évoques, Lune. Mais si je peux oser une suggestion pour l'un deux, remplacer "les" par "ses" dans "les larmes seront mères" pourrait peut être améliorer la compréhension ?

En tout cas, je trouve les deux versions intéressantes. Le dernier niveau en lui-même est génial, sans même savoir comment tu es arrivé là. Et la succession renforce le côté incantatoire de ton poème, avec l'anaphore du début, le fait que cela croisse peu à peu, comme si tu avais planté une graine et que tu nous invitais à regarder grandir la plante, et le fait de retrouver des bouts de vers qui prennent d'autres sens et que l'on redécouvre sous un nouveau jour. Bref, c'est une idée excellente !^^

Dans ma pioche du jour, j'ai choisi "Scissipare".
Rien à faire, il y'a des mots qui attirent plus que d'autre.

Je ne saurais dire si je m'attendais à ça, mais j'ai été agréablement surprise.

J'ai été enthousiasmée par ces images pour le moins inattendues, parfois c'est vrai, difficile à visualiser, mais après tout, c'est de la poésie.

"Tuez donc un oiseau vous ferez crier l'air" Gaahh ! Moi j'aime cette image !

La diction de ce vers ne m'a pas choqué, mais si on veut le rendre plus fluide on peut remplacer "vous ferez" par "entendez", mais même pas sûr que ce soit mieux.

Par contre je dois avouer que je n'ai pas compris pourquoi tu en as fait deux versions.
Je suis d'accord avec Zinzolin : (dont la critique entière est très bien faite, je ne fais que broder finalement...)


Mais le fait est qu'en laissant apparaître la deuxième version, cela nous pousse forcément à comparer et j'ai vraiment faible pour la deuxième.

Bon c'est vrai, dès qu'il y a un jeu de répétitions (à moins que ce ne soit ce "côté incantatoire" ? ) je ne suis plus objective. C'est plus fort que moi, je suis plus accrochée, peut-être parce que plus sollicitée ? Et puis inconsciemment il y a certainement le coup de l'alexandrin.

Alors j'en viens à penser que le dernier paragraphe ne prend toute son ampleur qu'avec son début.

Mais du coup, comparé au début, il lui manque deux ou trois répétitions pour ne pas faire trop "cheveu sur la soupe". Ce qui pourrait expliquer pourquoi tu en as fait deux versions ?

En fait je rejoins Lune sur le point des trois versions possibles.



Dernière chose, je trouve qu'il y a un problème avec ce vers :
"Coupez un vers en deux, il en poussera deux." C'estt dommage les 2 "deux", non ?

Voilà, c'était la critique du jour. ^^




Totalement.


Edit : je me suis peut-être un peu emportée dans ma critique là...
Mais vous comprenez mieux maintenant pourquoi je ne commente pas souvent dans le rayon poésie.... Quand on veut faire bien, ça prend trop de temps !!!!!

Je crois que tu confonds première et deuxième version. La première est la finale et la deuxième est la fabrication de la première et non une autre version. Bref, Nani s'expliquera mieux que moi.^^

En fait le procédé de fabrication du poème est le suivant :
Tu prends un vers :

"Coupez un vers en deux, il en poussera deux"

tu le découpe

"Coupez un vers en deux
il en poussera deux"

et tu complètes :

"Coupez un vers en deux, il cicatrisera
Coupez une aile à l'ange, il en poussera deux."

Puis tu redécoupes, et ainsi de suite. C'est un poème qui se développe par scissiparité. Et il n'y a pas deux versions, mais une seule version finale de seize vers, ou bien (dans le spoiler) toute une lignée de poèmes : le premier vers a donné deux vers, qui en ont chacun donné deux (ça fait donc un quatrain), qui en ont chacun fait deux, etc...

euh....
Après 4 heures d'"abrentissage" de cours de microbio, je crois que je vais laisser ça pour demain...

Figure-toi que l'idée m'est venu pendant que je corrigeais le concours blanc de microbio, justement...

Merci pour l'explication du procédé de fabrication, c'est une belle idée, j'aime beaucoup !
Toujours tes idées pour ton livre scientifiquement poétique ? :p

J'ai un peu de temps devant moi donc j'en profite. J'ai choisi de ne pas lire le spoiler (je dois être le seul à ne pas tjs les lire ^^).
J'ai apprécié ton texte, rempli d'images intéressante. Il m'attire sans que je sois complètement fan, ce qui m'empêche de le lire encore et encore et donc de me lasser. Je préfère cela. C'est léger et recherché en même temps.

Il me semble que tout à déjà été dit... Personnellement aucun vers ne me gêne, les mots coulent d'eux même dans un rythme bien réglé. Les images sont merveilleuses... Un vrai petit chef d’œuvre.

Ha, cette idée de scissiparité est vraiment sublime !