Le Temps des Rêves

J'y pense car on écrit, on écrit, mais que lit-on? Je suis certaine que nous avons tous une petite phrase, un poème à faire partager.
Est-ce qu'on pourrait essayer de mettre les rassembler ici, les poèmes et les citations qui nous inspirent (ou ne nous inspire pas mais alors pas du tout!), pour se créer un trésor national (de la nation du TdR)?

note : Wen, il faudrait indiquer dans le titre qu'il s'agit d'un topic destiné aux citations poétiques. (de la rigueur, de la clarté et de l'organisation comme disait l'autre !)

note 2 : N.B : Si possible, merci d'indiquer l'auteur en gras et le titre de l'ouvrage dont la citation est extraite en italique (de la rigueur, de la clarté et de l'organisation ! Grand Sourire)

***

Tu prends le risque de te retrouver sous une avalanche de Christian Bobin si j'en crois Lune et poulix (et peut-être d'autres... qui sait ! ). Mais pour ce premier post, je vais me réfréner et vous offrir un peu de Baudelaire, de Simon et de Nietzsche (joli trio ^^).

*Baudelaire, Le Spleen de Paris ou Petits Poèmes en Prose (Enivrez-vous) :
« Il faut être toujours ivre. Tout est là : c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre,il faut vous enivrer sans trêve.
Mais de quoi? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise, Mais enivrez-vous, Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé , dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est; et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront : "Il est l'heure de s'enivrer! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous; Enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise »

*Claude Simon, La route des Flandres
"Je les vis à l'autre bout de l'écurie palabrant ou plutôt se taisant, c'est-à-dire échangeant du silence comme d'autres échangent des paroles c'est-à-dire une certaine espèce de silence qu'ils étaient les seuls à comprendre et qui était sans doute pour eux plus éloquente que tous les discours."

*Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra
"Il faut porter en soi un chaos pour pouvoir mettre au monde une étoile dansante"

Excellente initiative les amis, je vous suis ! En avant pour le trésor national !

* Christian Bobin, Ressusciter

« J’écris pour me quitter, aussi pour inventer une maison pour les vivants, avec une chambre d’amis pour les morts. »

« Un lit de lumière, une chaise de silence, une table en bois d’espérance, rien d’autre : telle est la petite chambre dont l’âme est locataire. »

« Il y a une étoile mise dans le ciel pour chacun de nous assez éloignée pour que nos erreurs ne viennent jamais la ternir. »

« Je n’aime que les écritures dont l’auteur a été arraché au monde, pour quelque raison que ce soit : une douleur infinie, une joie sans cause ou simplement le sentiment d’être un étranger sur terre. »

« Ce matin j’ai vu une tourterelle battre des ailes à l’instant où elle sortait des mains de Dieu. »

« Les feuilles tombées du tilleul se recroquevillent comme un cœur se resserre autour de ce qu'il a perdu. »

« Tout ce que je sais du ciel me vient de l'étonnement que j'éprouve devant la bonté inexplicable de telle ou telle personne, à la lumière d'une parole ou d'un geste si pur qu'il m'est évident que rien au monde ne peut en être la source. »

(promis, promis, je ne vais pas mettre que du Christian Bobin, mais il fallait bien commencer en beauté ... et honorer la prédiction de poulix !)

* William Ernest Henley, Invictus

Out of the night that covers me,
Black as the pit from pole to pole,
I thank whatever gods may be
For my unconquerable soul.

In the fell clutch of circumstance
I have not winced nor cried aloud.
Under the bludgeonings of chance
My head is bloody, but unbowed.

Beyond this place of wrath and tears
Looms but the Horror of the shade,
And yet the menace of the years
Finds and shall find me unafraid.

It matters not how strait the gate,
How charged with punishments the scroll,
I am the master of my fate:
I am the captain of my soul.

Ah j'adore celui d'Invictus!!!* *

"Tout l'automne à la fin n'est plus qu'une tisane froide. Les feuilles mortes de toutes essences macèrent dans la pluie" Le parti pris des choses, Francis Ponge

*Christina Rossetti

Promises like pie crust

Promise me no promises,
So will I not promise you:
Keep we both our liberties,
Never false and never true:
Let us hold the die uncast,
Free to come as free to go:
For I cannot know your past,
And of mine what can you know?

You, so warm, may once have been
Warmer towards another one:
I, so cold, may once have seen
Sunlight, once have felt the sun:
Who shall show us if it was
Thus indeed in time of old?
Fades the image from the glass,
And the fortune is not told.

If you promised, you might grieve
For lost liberty again:
If I promised, I believe
I should fret to break the chain.
Let us be the friends we were,
Nothing more but nothing less:
Many thrive on frugal fare
Who would perish of excess.

(Haha, à la place de Christian Bobin j'ai lu Christine Boutin...)

Chrissss... Arg! Vede retro Boutin! (ok, pas de politique... l'exorcisme c'est de la religion, j'ai droit?)

En attendant, lire de l'anglais, c'est frais ^^

ouais ! on comprend pas tout mais c'est jôlii

Je suis plongée dans le programme de l'année prochaine.... Philippe Jaccottet, A la lumière d'hiver
Et finalement, il a vraiment ses moments de génie. Enfin, à mon humble avis...


"Muet. Le lien des mots commence à se défaire
aussi. Il sort des mots.
Frontière. Pour un peu de temps
nous le voyons encore.
Il n'entend presque plus.
Hélerons-nous cet étranger s'il a oublié
notre langue, s'il ne s'arrête plus pour écouter ?
Il a affaire ailleurs.
Il n'a plus affaire à rien.
Même tourné vers nous,
c'est comme si on ne voyait plus que son dos.

Dos qui se voûte
pour passer sous quoi ?"

(in La leçon)




"Arrête-toi, enfant : tes yeux ne sont pas faits pour voir cela,
ferme-les encore un moment, dors en aveugle,
oh encore un moment ignore, et que tes yeux
restent pareils au ciel naïf.

Recueille les oiseaux et la lumière
un temps encore,
toi qui grandis pareille à un tremble scintillant,

ou recule - si tu ne veux pas crier de peur
sous le harpon."

(in Chants d'en bas)

Il faut un peu de concentration, mais effectivement j'adore ! Particulièrement l'extrait de la leçon, je ne saurai pas décrire ce qu'il me fait ni pourquoi il le fait, mais je le trouve vraiment génial.

Même ressenti que Nani.

Ce que je trouve dommage dans ce recueil, c'est qu'à part une dizaine de poèmes qui m'ont vraiment marquée et qui se distinguent des autres, comme ces deux-là, les autres se répètent beaucoup. Les mêmes mots reviennent sans cesse d'un poème sur l'autre, certains tombent dans la pseudo-philosophie...
D'un autre côté, cela s'explique aussi par le fait qu'il est effrayé par la vieillesse, de voir l'enfance qui s'est à jamais éloignée et sa mort qui arrive.

Pas vraiment de la poésie mais une petite odeur poétique malgré tout.

Les illusions perdues, 185-1843, Balzac

*p561 il vient des pays malsains ou de ceux où l'on a le plus souffert des bouffées qui ressemblent aux senteurs du paradis. Dans une vie tiède, le souvenir des souffrance est comme une jouissance indéfinissable.

*p581 (à la fin de la lettre de suicide de Julien) : La résignation, mon ange, est un suicide quotidien , moi, je n'ai de résignation que pour un jour, je vais en profiter aujourd'hui...

*p450 Le poète demeura dans un complet abattement, assis dans un fauteuil, assis au pied du lit de Coralie, en ne cessant de la regarder, jusqu'au moment où il vit les yeux de l'actrice tournés par la main de la mort.

"Ne pas gaspiller dans l'unique souci de manger tout de suite notre simple force d'avoir faim"

Alain Damasio, La Horde du contrevent

"La maturité de l'homme est d'avoir retrouvé le sérieux qu'on avait au jeu quand on était enfant"

(idem)