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Arbre

Le Temps des Rêves

Avatar de MKL MKL Mode Lecture - Citer - 27/11/2019 15:57:20

J’ai pris le train l’autre soir. Tard. Bien plus tard que d’habitude.

Il n’y avait plus de train après une certaine station. Travaux ont-ils dit.

Devant la gare, deux clans. Ceux qui avaient quelqu’un qui venait les récupérer

Et les autres.

J’étais de ceux-là. Enfin presque.

Nous étions un petit groupe et pourtant c’est comme si je les repoussais.

Je n’avais qu’une différence visible avec eux. Mes racines sont dans ce pays mais pas les leurs.

Là, sur ce quai à attendre le bus de substitution, il y avait des langues, des sons chantants.

Bien qu’exclu, je trouvais cela beau sans y comprendre un mot. Ou alors pas beaucoup du moins.



Ces femmes et ces hommes rentraient tard du travail, allaient au travail, enchaînaient deux travails.

Je sortais du restaurant. Un grand restaurant. Offert par mon entreprise.

Le chauffeur du bus est arrivé, est descendu du bus et m’a vu. Seul, entouré par les autres.

Il a eu un mot sympathique pour tous ceux qui montaient dans le bus, demandant la destination.

Il en a fait de même avec moi. J’y ai répondu. Il a ri.

Ces femmes et ces hommes ont changé. Vis-à-vis de moi, les regards ont changé.

Je rentrai tard, comme eux. Ils ne savaient pas pourquoi, mais ils s’en moquaient.

La fatigue est la même pour tous.



A les écouter parler de leur journée, de leur métier, j’ai compris une chose :

Ce bus transportait des engrenages. Les pièces d’une société qui doit tourner.

Comme des rouages, aucun de nous n’était tout lisse. Avec nos fêlures, nos crans, nous continuons de tourner,

Pour que d’autres puissent tourner également.

Ces roues dentées, chauffeur compris, qui voyagent tard le soir, font partie du grand mécanisme.

Le mécanisme du quotidien. Celui-ci à des pièces visibles, une décoration plus ou moins jolie selon les goûts.

Mais surtout il a toutes ces mécaniques cachées.

Ces engrenages tournent, tous les jours, s’usent sans que la majorité ne les voient.

Il est normal qu’ils se méfient lorsqu’ils sont oubliés. Et pourtant, ce soir-là dans ce bus

Ils m’ont accepté, accueillis. Nous étions tous des rouages.

Des rouages sur d’autres roues, se dirigeant dans des directions pas si différentes que cela.



Qui peut se targuer de ne pas avoir besoin d’eux, besoin des autres ?



Mickaël Landès

23/11/2019

Licence Creative Commons

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 30/11/2019 17:01:06

J'ai bien aimé ! C'est écrit assez simplement mais ça pose beaucoup de questions et l'image est claire. Pour la fin, je pense que j'aurais préféré sans le dernier vers. En tout cas j'ai eu l'impression ue tu tâtonnais un peu pour réussir à trouver une chute.

Avatar de MKL MKL Mode Lecture - Citer - 30/11/2019 18:09:04

J'ai énormément hésité pour cette dernière phrase car en effet je ne savais pas trop comment finir et en m^me temps je voulais cette phrase qui sert un peu d'éveil de conscience.
Je pense que c'est pour cela qu'il y a une ligne de séparation inconsciente.

Avatar de Faël Faël Mode Lecture - Citer - 25/10/2020 11:25:25

J'aime beaucoup l'évolution.

Je pense que la dernière phrase est nécessaire, surtout que les vers précédent rappellent une idée de différence, d'altérité, avec les direction (pas si) différentes et les "autres roues". Ce sont toujours deux mondes distincts. D'où, je pense, le rappel de l'interdépendance (qui elle-même pourrait prêter à discussion, politiquement/philosophiquement parlant, mais j'ai bien l'impression que l'idée ici est celle d'interdépendance).

En revanche, en l'état, cette dernière phrase me semble mâtinée de moralisation avec les verbes "pouvoir" et surtout "se targuer", qui critiquerait un orgueil mal placé, alors qu'il s'agit peut-être davantage d'ignorance. J'aurais préféré quelque chose comme "Qui pense vraiment ne pas avoir besoin d'eux, besoin des autres ?" ou "Qui peut vraiment se passer d'eux, des autres ?"

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 04/11/2020 20:21:17

J'aime ta dernière proposition !