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Arbre

Le Temps des Rêves

Avatar de Faël Faël Mode Lecture - Citer - 07/08/2015 11:53:20


(Silence)

LA MORT !!

(Silence)

Monstre informe !
Je te renie
Je t'abhorre, t'exècre, te bannis
Je t'interdis !

Tu n'es pas, ne peux pas être !
Je te refuse.

(Silence, étiré à l'envi par l'orateur)

Voilà ce que c'est que la mort !
C'est le silence, l'absence, le néant !

Oh, mais je ne te parle pas de ce qu'il y a après la mort.
Je ne le sais pas.
Je n'y suis pas encore allé.
Ce voyage attendra encore un peu.

Non, je te parle de ce que c'est que la mort,
De ce côté-ci de la frontière de la vie.

La mort, c'est
Cette voix qui se tait à jamais c'est
Cette présence qui disparaît c'est
Ce vide.
Au fond.
De ton cœur.

Tu ne savais pas, hein ?
Tu ne savais pas que du rien pouvait prendre autant de place dans ta vie.

Tu ne veux pas de leurs conneries philosophiques
Tu ne veux pas de leurs âneries religieuses.
Ce que tu veux, c'est
Qu'il revienne.

Ne t'en fais pas.
Le néant, le vide, le rien, ce n'est pas la fin.
Tu ne peux pas le remplir.
Ce trou noir dans ta poitrine, tes larmes ne feront que s'y perdre.
Mais on peut construire sur du vide.
Le vide, c'est ce qui nous tient tous ensemble.
C'est fort, le vide. C'est puissant.
Un peu comme toi.
Ce vide, il va t'agréger, te solidifier.
Quand tu te relèveras, il sera toujours là.
Mais il sera protégé, enveloppé, entouré.
Et tu pourras même y prendre appui.

(calme)
La mort...
Souvent, tu n'y peux rien.
C'est l'impuissance, aussi, alors ?

Quand elle frappe et qu'elle arrache,
Qu'elle griffe, qu'elle troue, qu'elle perce,
Tu ne peux pas t'en protéger.
Ou alors, pas longtemps.

Embrasse la douleur, nourris-la jusqu'à
Ce qu'elle soit repue, satisfaite.
Alors, elle s'en ira.

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Avatar de Jeff Jeff Mode Lecture - Citer - 07/08/2015 18:19:51

Très beau texte ! A déclamer plus qu'à lire, à coup sûr ! Les genres de didascalies donnent un rythme et une forme particulière, on s'impose un arrêt dans la lecture. A l'oral je suis sûr que ça détonne encore plus !
J'ai bien aimé la progression du texte, d'abord le silence, puis quelques lignes, encore un silence, puis les vers s'amassent, il y en a de plus en plus jusqu'au calme et les derniers soupirs.
Ca me fait penser à la réaction que l'on a pendant une période de décès (pas le nôtre bien sûr). Un silence, un cri, un silence, des cris communs et un adieu paisible, tout ça mêlé à l'impuissance, l'absence...
Etait-ce recherché ?

Avatar de Faël Faël Mode Lecture - Citer - 07/08/2015 23:10:25

Merci pour le commentaire Petit Sourire

Oui, l'évolution semblable à la période de deuil est recherchée. Pas au début, puis je me suis rendu compte que j'avais commencé à suivre ce schéma, du coup je l'avais retravaillé pour mieux m'y conformer.

Avatar de Lune Lune Mode Lecture - Citer - 09/08/2015 15:22:14

Oui, comme Jeff, j'ai bien aimé la progression en densité, même si pour moi le passage du milieu est trop fourni et je m'y suis perdue.
Belle tirade !

Avatar de poulix poulix Mode Lecture - Citer - 09/08/2015 16:04:57

Oh ! J'aime beaucoup, beaucoup, beaucoup !
Ce serait un plaisir de l'entendre déclamé (ou de le déclamer moi-même !).
J'aime bien le mélange entre l'introspection et la colère.

Par contre, j'aime un peu moins la fin.
"Embrasse la douleur, nourris-la jusqu'à" --> le "embrasse la douleur" m'a éjectée vers un autre univers, plus dark. je n'ai pas aimé qu'on me donne cet ordre.
Perso, je pense que je finirai plus simplement. Juste en disant qu'un jour elle s'en va...

Mais, en tout cas, merci pour ce texte !

Avatar de Faël Faël Mode Lecture - Citer - 13/08/2015 18:46:47

Merci Petit Sourire

Poulix : Je n'étais pas sûr de la formulation à adopter ici. En y repensant, peut-être qu'un "laisse passer la douleur, laisse-la se nourrir jusqu'à/" conviendrait mieux.

Avatar de naniquolas naniquolas Mode Lecture - Citer - 13/08/2015 20:09:17

Moi aussi j'aime beaucoup ! Particulièrement la forme poème-théâtre qui rend le ton très vivant. En revanche je n'ai pas aimé ce passage :

Souvent, tu n'y peux rien.
C'est l'impuissance, aussi, alors ?

Quand elle frappe et qu'elle arrache,
Qu'elle griffe, qu'elle troue, qu'elle perce,
Tu ne peux pas t'en protéger.
Ou alors, pas longtemps.


Je trouve que le ton est trop réflexif, les mots prennent trop de détours pour décrire quelque chose que je ressens comme cruellement évident : le sentiment d'impuissance. J'ai l'impression que tu argumentes pour montrer qu'on est impuissant alors que le sentiment qui vient en premier, qui s'impose au départ, c'est le sentiment d'impuissance. Pas besoin de réfléchir pour se sentir impuissant, à la rigueur on pourrait argumenter pour montrer que parfois on y peut quelque chose mais bon... Bref, je ne sais pas si je suis très clair mais j'aurais préféré quelque chose de plus net, de plus coupant pour décrire cette impuissance. Tu as introduit de la violence avec tes images mais je pense que la violence devrait d'abord se ressentir par la brutalité du rythme, que la phrase nous arrive dessus comme un événement brutal et imprévu...

Sinon, chapeau pour le déroulement du poème, on voit une belle évolution en peu de mots, c'est efficace !