Tadaaaam non je n'ai pas commencé le tome trois (qui pour les fans sera sur Souji, le jeune japonais expatrié en France). Mais les événements de ces derniers jours m'ont fournis beaucoup d'indications sociologiques et ethnologiques sur les réactions de différents peuples face à des événements de censure violent (et m'ont fait un instant ressentir le dixième de ce qu'on pouvait ressentir dans la société que j'ai mise en place dans le roman - c'était très bizarre et déstabilisant ==)
Je continue simplement ici mon rassemblement de textes inspiratoirs "pour la liberté de rêver" mais aussi de révolution, contre-révolution, etc.
Et voilà un texte que j'ai écrit suite aux événements aux alentours du 10 janviers (TOUS les événements y compris ceux du Nigéria etc.)
Dans "les Poètes", il y a des personnages qui sont pour faire la révolution et abattre le gouvernement totalitaire (qui pour rappel censure tout acte de création) (Julien, que je verrais bien dire le texte ci-dessous), d'autres pour rester cacher et attendre (les Poètes en général) et d'autres encore font parti du gouvernement sans mauvaises intentions pour ainsi dire et tentent tant bien que mal de faire vivre tout le monde ensemble (Naomi de son prénom ^^). J'imagine bien ce dernier personnage déclamer le discours du lien.
Les deux textes sont faits pour toucher, pour remuer les tripes des gens (dans le bon sens s'ils adhèrent à l'idée et dans le sens où ça doit les révolter s'ils trouvent ça inconvenant) ET NE REFLETENT PAS FORCEMENt LES PENSEES DE L'AUTEUR (précision importante !)
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Ecrit pour le printemps des Poètes 2013 ou 2014
Nous sommes
Les oubliés des cœurs, les mis-à-la-marge, les has been démodés. Pour trop de monde, nous sommes le passé. Et pourtant… nous sommes la lanterne qui éclaire l’obscurité de vos jours. Nous sommes l’espoir.
Nous sommes les gardiens de votre bonheur heureux.
Oubliez-nous !
OUBLIEZ-NOUS !
Et tentez donc de vivre sans nous !
Vous vivez des mots. Du simple « Bonjour » au plus banal « Merci ». Vous vivez de pouvoir articuler ces sons. De pouvoir lire ces lettres.
Nous sommes les gardiens des mots. Nous vous offrons leur force, leur puissance. Nous gardons leur lumière, qui tranche le brouillard de vos existences, en prenant garde à ce qu’elle ne vous éblouisse pas.
Nous sommes les gardiens oubliés, de ces mots oubliés. Passés sous silence. Nous souffrons leur sort. Mais pas de cris, pas de révolte. Pas de violence. Nous sommes Poètes, gardiens. Nous cohabitons. Nous vous laissons vivre. Laissez-nous nous exprimer.
Nous sommes faciles à faire taire. Qu’on lui coupe la langue ! Qu’on lui coupe les mains ! Mais il y en a parmi nous qui savent encore parler avec les yeux. Et si vous les leur enleviez, ils parleraient avec leur cœur.
Nous sommes tenaces. Pensez, que deviendront les mots sans nous ? Lorsqu’ils se libèreront du papier ou de nos phrases bien tournées ? Un simple mot… quelle révolution ont-ils déjà entraînée ? Quelle idée saurait vaincre un mot déchaîné ?
Nous sommes les gardiens de la Vérité, des plus grands secrets. Par nos écrits, nos paroles, nous cherchons à partager ce savoir si cher à nos cœurs, si nécessaire à vos âmes. Par nos écrits, nos paroles, nous voulons le faire découvrir à vous.
Nous sommes patients. Comme on apprend à un enfant à lire, on vous apprend à vivre. Avec vous-mêmes, avec les autres. Ensemble, unis par les mots.
Oui c’est prétentieux !
MAIS ALLEZ-Y DONC !
Essayez de vivre sans nous !
Faites-nous taire !
Laissez les mots libres !
Ils se soulèveront en flots de colère et de peurs, de pulsions sauvages, un mot n’a pas de conscience, il fait le bien et le mal, il n’est qu’envie, désir, IL NE REFLECHIT PAS ! IL NE PENSE PAS !
Libérez les mots de nous ! Libérez-nous des mots !
Observez-les briser nos lignes, casser nos textes, crever vos cœurs, exploser vos esprits, violer vos rêves, trahir les plus profondes amitiés.
Car oui, se sont ces mots que l’on garde. Qu’on vous offre à chaque printemps. Mais nous les rangeons, nous les classons, nous les apprivoisons. Nous leur apprenons à être doux, à vous respecter, à vous aider, vous soutenir, vous motiver, vous éclairer.
Mais oui.
OUBLIEZ-NOUS !
Coupez nos ailes !
On a trop parlé du pouvoir de ces petits êtres, vous n’y croyez plus. Ils ne sont que vos esclaves insignifiants, que vous utilisez chaque jour sans plus y faire attention. Et pourtant.
Pensez.
Pensez.
Le premier mot à se libérer sera bonheur, suivi de révolution.
Nous sommes votre peur, votre bonheur. C’est pour cela que vous nous craignez. Car nous voyons au-delà. Car nous avons la possibilité de changer. Et le changement fait peur. Mais c’est pour ça que vous nous aimez. Vous avez soif de notre liberté, vos âmes inlassablement cherchent à s’abreuver à nos calices, que nos mots fusionnent avec votre sang, que vous les sentiez vous brûler. Découvrir ces sentiments qui vous sont inconnus, ces horizons qui vous restent cachés.
Nous sommes votre drogue. Sans nous, c’est la mort cérébrale assurée. Vous le savez, mais répétez inexorablement les mêmes erreurs, encore. Et encore.
Nous sommes toujours les premiers à tomber. Mais nous seuls survivons au Temps. Vous nous bâillonnez, innocemment, indulgemment, involontairement. Vous retirez les couleurs du tableau de votre vie quotidienne. Sans le savoir, ou en ayant parfaitement conscience de votre geste, mais incapable d’avouer la faute, vous vous tuez. En nous taisant.
Allez-y !
ALLEZ-Y ! OSEZ !
Oubliez ! Oubliez-nous ! Oubliez les saveurs de la vie !
Effacez-nous de votre mémoire, vivez sans nous !
Libérez-nous de vous !
Puisqu’il vous faut perdre ce qui vous maintient en vie, afin de voir à quel point cela vous était vital ! Laissez-nous disparaître ! Effacez-nos traces, qu’il ne reste que le mythe ! Le mythe ardent, qui vous hantera, comme une plaie qui ne guérit jamais. Un manque vous vous ne comblerez jamais.
ALLEZ-Y !
Arrachez nos plumes !
Piétinez vos âmes !
Massacrez vos espoirs !
FAITES-NOUS TAIRE !
Condamnez-nous au silence !
Nous garderons les mots,
Dans nos cœurs.
Et vous ? Allez-y ! Vivez sans eux !
Laissez tomber les Poètes, ils n’en valent pas la peine.
Et expliquez, à tout ces regards déçus, à tout ces yeux en pleurs, ces visages graves, aux espoirs déchus, qu’ils n’auront pas de printemps, parce que les premiers à tomber, les plus faciles à condamner au silence, c’est nous.
Nous sommes.