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Arbre

Le Temps des Rêves

Avatar de Contraste Contraste Mode Lecture - Citer - 17/05/2012 19:57:55

Tout ceci est inspiré de rêves cauchemardesques. Ce n'est pas mon histoire que je veux raconter, c'est celle des personnages, et eux seuls écriront leur destin.


Je rappelle que le but de cette fiction n'est pas d'inciter à l'horreur et à la violence ou toute autre forme d'absurdité humaine, ni de pointer d'un doigt accusateur la folie du dit Bipède et, à l'instar de Lautréamont dans ses Chants de Maldoror, provoquer le bien chez le lecteur en lui montrant le mal. Non, il s'agit simplement de déchirer le Voile. Brûler vive l'hypocrisie qui nous rend aveugle.
Faut-il préférer le bonheur à la vérité ?
J'ai fait mon choix.

Âmes sensibles, s'abstenir.


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« Ouvre les yeux. »



Prologue



Une cabine téléphonique rouge comme on en voit à Londres. Une Dodge, ancienne, est garée à côté. Nous sommes à l’Aube du XXIIème siècle, mais, pour l’instant, ils sont tous vêtus comme dans les années 30.

- Tu n’aurais jamais dû partir, jamais.
- Papa….
- Tu ne comprends donc pas que je t’aime, mon fils ? Tu n’as aucun respect, aucune considération pour l’amour que je te porte ? POURQUOI ES-TU PARTI ?
Uriel raccrocha. Ce n’était pas les larmes de son géniteur qui allaient le troubler. Il ne méritait rien que son mépris le plus intime. Les larmes n’effaçaient pas les coups portés.
Karl l’attendait.
- Où va-t-on maintenant, Lord ?
- Là où les chiens qu’il ne va pas tarder à m’envoyer ne pourront pas me trouver.
Ils montèrent dans la Dodge. La pluie était battante.


- Allan ! Chapeau ! hurla Uriel.
Allan s’empressa d’ôter son couvre-chef et de balbutier :
- Excusez-moi Lord, excusez-moi j’ai oublié…
- Ce truc miteux ne te va pas du tout mon cher Allan, tu devrais le jeter.
Uriel caressa les cheveux de son sbire, presque avec tendresse, comme si il allait dire « Tu es un bon chien ».
- Karl, va chercher les autres, Allan, tu t’occupes de la surveillance satellite. Au moindre mouvement de ces bâtards je veux être averti.
Uriel marqua une pause, regarda fixement son interlocuteur et s’abaissa pour lui murmurer : Tu ne voudrais pas qu’ils t’injectent des cafards dans le bras, comme ils l’ont fait pour Avrey ?
Allan eut un long, très long frisson et se remit au travail tandis que son chef allait fumer à la fenêtre, regardant les ruelles sous l’averse.
Ils étaient douze. Un ramassis d’incapables, songea Uriel, à l’exception d’Allan, Karl, Manfred et ce qu’il restait d’Avrey. Ce dernier avait l’allure d’un lépreux depuis l’Injection, son corps pourri ne fonctionnait presque plus, mais il était toujours d’une incroyable lucidité. Avrey avait une sorte de don de voyance qui les avait maintes fois tirés d’affaire. Hélas, le pauvre n’en avait plus pour très longtemps. De temps à autre, alors qu’on lui parlait, un cafard surgissait de sa bouche, de ses bras ou du ventre ; la dernière fois il y en eut même un qui jaillit de l’oreille - ils ne devaient plus être bien loin du cerveau, la fin était proche.
Allan était un petit maigrichon maladif et peureux, habillé comme un croque-mort, et ses mains tremblaient tout le temps à cause de l’alcool dont il abusait depuis la mort de sa famille. Aucune aptitude au combat mais des talents d’informaticien remarquables. Quant à Karl et Manfred, c’était deux forces de la nature, il émanait de chacun d’eux une puissance sauvage, brute, quelque chose de viscéralement animal. Hormis cela, ils étaient de parfaits opposés. Karl avait les cheveux noirs coupés courts et les yeux verts, Manfred possédait une longue tignasse blonde, un regard bleu ; le premier était svelte malgré sa force, de nature froide et réfléchie, l’autre n’était qu’un tas de biceps démesurés obsédé par la bière, la choucroute et la bagarre – et il avait pour cette dernière un talent tout à fait remarquable qui lui valait sa place dans le top 5 d’Uriel.
Karl revint avec le reste de la bande. L’unique ampoule éclairant l’entrepôt grésilla en clignotant deux fois alors qu’un doux gargarisme s’échappa du corps avachi dans un coin.
- C’est Avrey qui taquine le courant, il doit encore avoir une vision. Qu’est-ce qu’il y a, vieux ? demanda Steffler, une nouvelle recrue.
- Je vois… - et des larves de blatte dégoulinaient en nuée, s’échappant de sous sa langue – Je vois des chiens… Chiens… La mort…
Ses paroles se perdaient dans un souffle rauque et insaisissable. Puis ses yeux s’écarquillèrent et soudain, il reprit d’une voix sonore et articulée :
- La main de gloire ! Le Lord sera couronné par le sang ! Les robes seront laides, l’hôtel désarticulé ! Le gastéropode trouvera sa sœur à l’Aube du cauchemar, la folie s’étendra alors… Sur le monde.
Il mourut dans l’instant, les laissant tous sous la lumière blafarde, une odeur d’excréments s’agrippant aux murs bleus délavés. Personne n’échangea un mot. Dans la nuit, ils se réveillèrent en pleine horreur : des centaines de cafards avaient envahis leurs couches et vagabondaient sur leurs corps, avides, les pondeuses cherchant à s’insinuer par tous les orifices. La nuit fut longue, les hurlements, incessants.

Chapitre I

Uriel regardait la pluie épaisse à travers la vitre de la voiture tout en enlaçant une mèche de cheveux atour de son index. Ils avaient laissé les morts provoqués par les blattes, soit Avrey, Gael et Omar, dans l’entrepôt. Pas assez de temps pour une cérémonie à cause des insectes affamés et de la nécessité de se trouver le plus vite possible une autre planque.
- NOM DE DIEU ! hurla Allan d’une voix suraiguë.
Tout le monde sursauta et Edmond, au volant, faillit rentrer dans un réverbère. Le visage d’Allan était couvert de sueur, encore plus blême que de coutume, et son grand nez crochu, paré d’une énorme bosse, reniflait sans cesse. Allan était extrêmement tendu depuis la nuit et il observait présentement, terrifié, une blatte qui courait sur son bras droit. L’insecte, long comme un doigt, triturait la veste noire de ses antennes frémissantes. Manfred éclata d’un rire gras puis la saisit et fit joujou avec un long moment, lui arrachant les pattes une à une comme pour jeter un maléfice vaudou à son espèce.
- T’es vraiment crade, vieux, siffla Steffler.
- D’ailleurs, il y a comme une odeur répugnante, ajouta Edmond.
Manfred ne répondit pas, captivé par les mouvements d’antennes de l’insecte, si convulsifs qu’ils hurlaient en silence, exprimant éloquemment la souffrance du supplicié. Allan tremblait au moins aussi fort que l’insecte, chacun le sentait, et les moignons du cafard, en continuant de s’agiter, produisait un crissement qui ne tarda pas à faire monter la tension d’un cran. Tous regardèrent, hypnotisés, les membres tomber à leurs pieds, s’agitant comme pour tenter de marcher, remplir une mission obscure qui n’était plus à leur portée.
- E… Edmond a r-raison, il y a une… Une odeur… Et-trange… , murmura Allan.
- Ne vous agitez pas. C’est juste, ça…
Uriel répondit en extirpant de sous son siège un objet long emballé dans un sac poubelle.
- Avrey n’avait jamais déliré comme le soir de sa mort. Mais ses visions se sont toujours affirmées exacts. Ceci…
Il extirpa un bras du paquet.
- Est le bras d’Avrey. Vous savez tous qu’il était le plus expert des voleurs. Et, comme il l’a prédit, je vais en faire une main de gloire.
Il marqua une pause, et reprit :
- Je veux un silence absolu. Edmond, prends garde aux secousses. Cet instant a quelque chose de sacré. Et Allan, ARRÊTE DE TREMBLER.
Uriel, installé à la place du passager avant, avait pris un air de gourou inspiré. Il dégaina un long poignard, l’enfonça dans la peau pourrie du bras et entreprit d’extraire les os, y compris ceux de la main. La viande était totalement infectée et pleine de blattes mortes, qu’Uriel avait pris soin de tuer avec une petite bombe de gaz. Alors qu’Allan réprimait à grand peine un haut-le-cœur, Uriel ouvrit la fenêtre et jeta les morceaux de peau. Ensuite, il gratta longuement les os jusqu’à ce qu’ils soient nettoyés de toute chair, à l’exception des tendons qu’il avait laissés afin que le bras et la main restent articulés. Plus tard, il y appliquerait une lotion qui les ferait durcir et les préserverait de la décomposition avancée. Enfin, il arracha un pan de sa veste pour en enrober le bijou achevé, et se lava les mains par la fenêtre avec la pluie.
- Et voilà.
Il avait fait du bon travail, l’objet resplendissait macabrement. Il est vraiment cinglé, songea Edmond, et il ne devait pas être le seul. Mais Uriel était aussi le père qui leur manquait à tous. Un leader dangereux, imprévisible, cruel parfois, certes, qui les avaient pourtant toujours tirés d’affaire, leur avaient offert une voie, un but, une vie.
- Edmond, vérifie que les autres nous suivent bien. Loys n’a pas l’habitude de conduire, je ne voudrais pas qu’il perde notre deuxième voiture…

Loys jeta un coup d’œil dans le rétroviseur. Karl s’était endormi, le visage contre la vitre. Sa poitrine se soulevait à intervalles réguliers, paisiblement. Les vêtements qu’il portait cachaient mal le corps superbe dont il était pourvu. Il était décidément beau comme un dieu. C’était un dieu. Et ses lèvres, parfaitement dessinée, une invitation. Loys n’avait jamais osé lui faire part de ses sentiments de peur d’être rejeté. Le grand brun l’intimidait beaucoup trop : taciturne, toujours la mine sombre, réservé, il avait l’air totalement inaccessible. D’autant plus envoûtant. Loys se dit, en songeant aux derniers évènements, que la vie pouvait être bien courte et qu’il ferait mieux de la croquer à pleines dents s’il ne voulait pas avoir de regrets face à la faucheuse. Oui, il fera un effort. Pas question de crever sans avoir goûté ces lèvres-là, sans avoir offert son âme à Karl.
Il vit que Kruger lui jetait un regard en coin, taquin.
- Et ben Loys, tu reluques discrètement le beau Kaaaaarl ?
- J’ignore encore comment un abruti comme toi peut être mon frère…
- Allez, pas la peine de nier. J’te connais ! Mais pédé, quand même, ça m’étonne.
- Dégage ce sourire niais de ta gueule, abruti. Je suis concentré sur la route, on parlera plus tard.
- Bah, je suis fatigué. T’as de la chance. Un petit somme ne me fera pas de mal… Aaah…
Il s'endormit presque instantanément.
Crétin. Comment puis-je avoir un frère aussi peu ouvert d’esprit…Pourquoi n’avons-nous pas le droit d’aimer, sans restriction de sexe, d’âge, de peau, de différence ? POURQUOI ?!
La radio crépita.
- La notion de famille n’est qu’un prétexte pour la préservation de l’espèce. Tu ne devrais pas t’emporter autant, Loys.
Loys marqua une pause.
- Désolé Lord, je croyais avoir coupé la communication. Est-ce que…
- Est-ce que les autres ont entendu pour Karl ? Non, rassure-toi. Ils dorment tous, excepté Edmond, et tu le connais assez pour savoir qu’il est comme nous, plus intelligent.
Lord Uriel avait entendu la courte dispute avec son frère, certes. Mais ensuite, Loys avait pensé. Et c’est à ça que le Lord avait d’abord répondu. Loys savait que le Lord le comprenait intimement, le Lord les comprenait tous… Néanmoins sa capacité de perception était hallucinante. Et Loys n’aimait pas cette manière de parler élitiste « Il est comme nous, plus intelligent. » A la voix du Lord, on eut dit que seuls les êtres de leur trempe avaient droit de vie. Loys n’était pas d’accord. L’humain, dans le fond, était bon. Et, par là même, chaque être méritait la vie.
- Tu penses trop fort Loys, j’entends tout. Et tu as tort.
Uriel avait coupé la communication.
Et toi et Edmond avez beaux êtres de charmants intellectuels pleins de sensibilité, vous êtes des incapables. Pas foutu de savoir tirer, hacker un ordinateur ou effectuer une mission d’infiltration. Depuis le temps, encore en formation ! Toute cette intelligence gaspillée inutilement... Pourquoi suis-je unique à être à la fois intellectuel, combattant, homme de terrain compétent et virtuose du Décryptage?

Uriel maudit le monde en silence.


[suite en cours]

Avatar de Gynoïde Gynoïde Mode Lecture - Citer - 17/05/2012 21:21:59

Palpitant...ou grouillant si tu préfères.
Mais ça coule vraiment tout seul et l'imprégnation est immédiate. Peut-être que la mise en place style "didascalie" y est pour quelque chose.

En attente donc.

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 17/05/2012 21:57:36

Brrr... C'est froidement génial ! J'aime beaucoup ton style dans ce début et tu arrives à me plonger dans un univers que j'ai plutôt l'habitude de fuir (oui, je sais, "âmes sensibles s'abstenir", mais tu avais éveillé ma curiosité^^). Très intéressant, donc !

Avatar de Contraste Contraste Mode Lecture - Citer - 20/05/2012 02:19:16

Voilà qui est plutôt encourageant... J'espère que vous allez accrocher avec la suite. Je crains de mettre trop de temps à instaurer la situation, les personnages.
N'hésitez pas à me faire part de vos critiques, quelles qu'elles soient.

Le début du chapitre I est ajouté ~

Avatar de Gynoïde Gynoïde Mode Lecture - Citer - 20/05/2012 12:34:48

Très sincèrement j'accroche pas mal.
Je ne suis habituellement pas très "thriller" ou "roman macabre", je ne sais comment nommer ce genre, mais ce début donne envie de savoir jusqu'où tu pousseras la personnalité de ces personnages.
Qui est vraiment Uriel ?
Qu'est-ce que c'est que ce monde où on se fait manger par des blattes ?

J'y reviendrai.

Avatar de Zinzolin Zinzolin Mode Lecture - Citer - 20/05/2012 18:24:24

C'est vrai que c'est toujours aussi (plus) glauque mais je trouve tes personnages attachants au-delà de leur métier et de leurs convictions. Comme Gynoïde, je ne suis pas fan de ce genre d'histoire mais là, tu me tiens en haleine, notamment par les fêlures dans la carapace des méchants. J'ai envie d'en savoir plus sur ce monde ! La suite !

Remarques d'orthographe et de style :

"en enlaçant une mèche de cheveux autour de son index" => tu veux pas dire "entourant" ou "enroulant" ?
Faute de frappe ligne suivante : "atour" => "autour"
"fit joujou" => Si tu y tiens, je m'y ferai, mais j'ai un peu de mal avec le gros malabar prêt à tuer et à torturer à qui tu colles un verbe de gosse de cinq ans...^^
Avanat dernière ligne : "avaient beaux êtres" => "avaient beau être"

Avatar de poulix poulix Mode Lecture - Citer - 21/05/2012 14:22:55

Ca claque !
Ton texte m'a tout de suite happée. Tu as une écriture énergique que je me plairais à qualifier de "cinématographique". On va droit à l'essentiel et certaines images font grimacer (franchement, le coup des cafards est assez ultime de réalisme et de puissance). Après cependant, j'ai un peu perdu le fil entre tous les personnages. Mais c'est en général ce qui m'arrive au début de tous les bouquins dans lesquels il y a plus de 4 personnages dès le début alors rien de grave ^^

Quelques remarques dérisoires mais fort utiles :

Spoiler - Afficher

comme si il allait dire --> s'il
Karl, va chercher les autres, Allan, tu t’occupes de la surveillance satellite --> je mettrais un poin t avant Allan. Ca rythmerait mieux (j'ai dû relire la phrase pour comprendre l'articulation pourtant basique ^^
avaient envahis --> pas d'accord du participe passé quand l'auxiliaire est "avoir (sauf que le COD se trouve avant ce qui n'est ici pas le cas)
heveux atour de son index --> cheveux
La viande était totalement infectée et pleine de blattes mortes, qu’Uriel avait pris soin de tuer avec une petite bombe de gaz. --> pas de virgule après "mortes"
Oui, il fera un effort. --> incorrecte. C'est du discours indirect libre, il faut donc que tu mettes du conditionnel --> il ferait


La suite !

Avatar de Contraste Contraste Mode Lecture - Citer - 27/05/2012 19:45:58

Merci ! ^^ Toutes vos remarques me font sacrément plaisir. Je suis en train d'écrire la suite mais faute de temps il faudra attendre un peu. Que j'ai aussi du temps pour lire ce qui se fait sur oméga, etc.

poulix : j'aimerais bien en faire un film ! :p

( je corrigerai les fautes avec le prochain chapitre )

Avatar de Wensaïlie Wensaïlie Mode Lecture - Citer - 09/02/2013 12:54:33

Baaah ! Après tout ce que j'ai pu lire de toi ces derniers jours je m'attendais à pire XD

j'ai bien aimé, mais je trouve qu'il y a quelques incohérences : comment il fait pour utiliser une bombe à gaz dans une voiture ?? Oo"' au moins ils sont tous aussi bien conservé que la main...

Au niveau de l'action pour moi ça reste quand même un peu trop décousu (pourquoi ils fuient à un endroit puis en partent ensuite juste à cause des cafards - d'ailleurs je trouve ça un peu gros les cafards mangeurs d'homme ^^')...

Sinon les relations que tu créé entre les persos sont intéressantes, et on sent que ça peut amener des questionnements sympa.