Le Temps des Rêves

Je suis cet homme devant toi,
Celui qui écoute, celui qui voit,
Celui qui ne parle pas
Dans ce fatras de non-sens.

Je suis celui qui n'admet pas,
Celui qui refuse,
Celui qui écrit.
Je suis cet homme qui te tend les bras.

Je suis cette femme à tes côtés,
Celle qui t'apaise, celle qui te console,
Celle qui porte la lumière
Quand l'obscur s'impose à tes journées.

Je suis celle qui vit
Celle qui marche,
Celle qui reste digne,
Je suis cette femme qui te sourit.

Je suis ce mot qui libère le cœur
Et que l'on ne supprime pas,
Je suis le choc.
Je suis la colère.
Je suis l'indignation.

Je suis le tumulte de nos silences...

Je suis cette photo qui raconte le monde,
Et que l'on ne déchire pas,
Je suis l'information,
Je suis la vérité,
Je suis la liberté.

Je suis le tumulte de nos silences...

Je suis ce dessin qui veut te faire rire
Et que l'on n'efface pas.
Je suis l’irrévérence,
Je suis l'insolence,
Je suis l'insoumission.

Je suis le tumulte de nos silences...
Cette lueur.

Cette étoile à laquelle tu te raccroches
Quand tu crois que tout fout l'camp.

Je suis celle qui lutte contre les anathèmes.
Je suis celui qui te dit « Je t'aime ».

Je suis ce papillon qui vole au-delà d'un jour,
Cet oiseau qui ne connaît pas les frontières.
Ce gosse qui te dit « espère ».

Je suis cette fleur fragile que l'on garde comme un trésor.
Je suis ce grand copain que tu ne connais pas encore,
Et je ne suis même pas mort !

Je suis celui qui rit,
Je suis celui qui pleure,
Je suis Charlie.

J'admirerais toujours la force du "Je suis" ou "nous sommes" dans les poèmes de "résistance" (http://omega.letempsdesreves.fr/topic.php?id=880&p=1)

Je trouve ton hommage très puissant, par son côté lancinant et par la concision des images.

Mais je trouve dommage de rajouter "Je suis Charlie" à la fin. On avait compris dès les premiers mots ce pour quoi tu écrivais et je trouve que ça réduit brusquement la portée de ton poème.

Je suis du même avis pour le je suis Charlie, surtout maintenant qu'il est (qu'il va être?) utilisé un peu pour tout et pour rien par "la foule" (la joie des slogans) mais d'un autre côté, c'est très personnel par rapport à l'auteur ici et je pense que malgré l'effet "réducteur" c'est essentiel au poème.

Moi aussi j'ai trouvé que la chute faisait perdre de l'ampleur à ton poème, mais c'est peut-être parce qu'à titre personnel je n'accroche pas trop avec ce slogan. Après je comprends effectivement l'importance qu'on peut y attacher, et que tu veuilles conclure avec. Je crois que j'aurais bien aimé m'arrêter à "Et je ne suis même pas mort !" qui sonne à la fois comme un regard qui se tourne à nouveau vers l'avenir et comme un cri de défi et d'insoumission.

Je ne répéterai pas ce que j'ai déjà dit sur les oeuvres de circonstance...

Je suis d'accord avec Nani. Mais d'un autre coté, je pense que le mot de "Charlie" doit apparaître quelque part. En titre, peut-être ?
J'aime bien cet être hybride, un et multiple à la fois, que tu nous décris. Et c'est vrai que ce verbe "être" est d'une puissance...

Très beau poème, j'aime beaucoup son rythme qui monte en puissance. Par contre, le je suis Charlie est vraiment de trop pour moi. J'ai vu le titre de ton poème, sa date et j'ai su immédiatement de quoi tu parlais. Il y a suffisamment de force et de vérité qui en sort pour ne pas avoir besoin de préciser de quoi tu parles.

Cela dit, je trouve qu'il manque de la nuance à ton poème. Puisque tu parles d'un fait, d'un contexte bien précis, je trouve que ton histoire est bien trop universelle et universalisant. A cela j'ajoute le fait que je le trouve un peu trop élégiaque. Il n'y a pas de héro qui ne se soit pas tromper, qui n'ait pas faillit, blessé. Après c'est une question d'opinion, je n'adhère pas au slogan.

Ca n'enlève rien à la force et à la beauté de ton écriture. Je ne suis pas Chalie mais j'aime ce poème.

Merci pour vos commentaires. J'ai choisi de garder ce texte tel qu'il est. Je l'ai lu à un groupe de lycéen il y a une semaine. Soit un mois après les attentats de Paris et pour eux, ces événements étaient loin. La chute "Je suis Charlie", les a replongé dans le contexte d'écriture de ce poème. Ils ont trouvé que ça changeait la perception du poème. Ils ont demandé une seconde relecture et il me faudrait beaucoup de lignes pour vous raconter le nombre d'impression que j'ai eu. "Au départ, on dirait que c'est un poème d'amour", "Non, c'est un texte qui interroge l'identité.", "Je dirais plutôt qu'on sent qu'il y a un truc qui cloche mais on sait pas quoi, et à la fin on le sait".
Bref, je laisse ce texte tel qu'il est. Et merci encore pour vos commentaires.

Je viens de le relire et en fait le "Je suis Charlie" final remet un cadre temporel et circonstanciel au texte alors que sans, le texte devient bien plus universel.

J'ai lu quelques commentaires puis j'ai arrêté. J'ai envie de rebondir sur le "je suis charlie". Je ne pense pas qu'il faille l'enlever. Dans le feu de l'actualité, c'est une évidence. D'ici un an, l'eau aura coulé sous les ponts et on aura "oublié", ce sera dans une strate enfouie de notre perception. Personnellement, j'aime ce passage de l'universel au particulier, de l'humain au personnel.

Et en musique il prend une toute autre dimension que je vous invite à découvrir!

Je trouve qu'en "live", déclamé au public avec la musique, c'était chouette, et la chute avait son impact.

Un poème fort et puissant que j'aime même si j'ai des avis contradictoires sur cette affaire... J'ai apprécié la chute qui a confirmé l'impression que j'avais eue au cours de la lecture et qui apporte, selon moi, un sens et une touche de révolte en plus.