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Arbre

Le Temps des Rêves

Sur un lit de pupilles rouges ecstasiée, repose son corps doux et émacié
La salle est noire.
Seules les angles, comme sur un dessin, sont visibles : de fines lignes blanches.
Il n'y a rien d'autre que son corps et l'outil de son repos, à l'exception
A l'exception d'un vieux tableau.
Une peinture enlarmée, à vrai dire
Un regard semblant seul y reposer.
Il ne regarde rien, ne voit probablement rien.
Ce regard est bleu, fade, très laid.
Les larmes y sont vulgaires, le tout,
Impossible.
Le tableau brûle en une seconde et disparaît.
Il y a désormais un homme assis, les jambes croisées, courbé
Sur une feuille qu'il déchire en y écrivant avec un scalpel.
Tout le sublime en cette pièce n'est que le corps assoupi,
Ses mèches souples et pâles, ses paupières engourdies
Sa peau ferme et tendre, son cou désinhibé
Ses traits parfaits.
L'homme allume la télévision, qui prend place sur tous les murs, sol et plafond compris.
Des milliards de visages, de silhouettes se dessinent,
On les vois tour à tour manger, déféquer, dormir, baiser.
L'homme semble chercher quelque chose parmi les images.
Intensément. Avec une passion fébrile, concentrée, indifférente ou profondément sensible.
L'homme ne semble pas être stable, peut-être n'est-il pas physiquement là.
Sans doute, même, n'existe-t-il pas.
Il est vêtu tout de noir avec une chemise blanche.
La peau vivante et le rouge, à côté de lui, détonent.
Un visqueux tentacule noir sors lentement de l'arrière de son crâne,
Sans qu'il ne s'en rende compte.
Les images défilent. Il ne la trouve pas.
Soudain, lucidité fulgurante,
Tous les murs ne montrent plus que l'image
De son propre corps endormi
Sur un lit de pupilles, ecstasiées, bleues claires.
Ses yeux bruns deviennent bleus.
Laids, fades, comme le tableau brûlé.
La cécité le gagne
Les regards aux pupilles extrêmement dilatées se mettent à dévorer les deux corps
Des crocs surgissent de toutes parts
Il est aveugle, il est sourd et fou
Sa peau se fripe, ses poumons exaltent de la fumée,
Son visage se crispe, ses yeux grands ouverts,
Tout brûle en une seconde et disparaît.

- Je n'existe pas.
Telle est la parole du fœtus.