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Arbre

Le Temps des Rêves

Le voleur aux dents de couleurs

Il avait la virilité d'une bague
Mais la vitalité d'un danseur,
quand il dégainait sa dague :
Le voleur aux dents de couleurs.

Vieux gredin, vieille catin!
Ainsi célébrait-on les incroyables larcins
De ce vieillard malingre et rieur
Le voleur aux dents de couleurs.

Un rubis brillant sur la dernière canine
Une émeraude incrustée sur la molaire arrière
Des saphirs sur les incisives qui résistèrent
Edenté, l'ennemi des propriétaires tirait pale mine

Dans ses poches, il ne restait jamais que dalle.
Dans ses manches jamais on n'avait aperçu butin
Sans anicroches, il dérobait le geste certain.
La poigne franche. D'un soin égal, jamais vandale.

Artisan subtil de la subtilisation
Il grappillait habile, sans obstination
Il allait, venait, voguait d'un deal à un vol à l'étalage.
Il arnaquait au village, escroquait, ami terrible, en voyage.

La main dans le sac? Pas de bol.
Il se laissait entrainer sans couacs car un tour en prison c'est drôle.
Puisque le soir même, il dansait la valse de l'évasion.
Chaque jour, il jouait cette chanson jusqu'à la déraison.

Le voleur habitait une maison sans hauteur.
Tous les jours, il plongeait ses voisins dans l'horreur,
les dépossédant gaiement toujours à la même heure.
A la ponctualité, il ne manquait jamais de faire honneur.

Insoupçonnable enjôleur au sourire cajoleur,
Il persuadait, toujours agréable, jamais racoleur.
Il jouait des tours et on l'en remerciait avec chaleur.
Quel être charmeur! Impensable trompeur.

Il ne rendait jamais ses larcins
A quiconque, il ne donnait jamais rien
Mais à chacun, il apprenait l'éternelle leçon
Rien n'est plus prompt à se faire la belle, que la possession.