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Arbre

Le Temps des Rêves

Après j’avais commencé ta critique détaillée en détail, mais je me suis arrêtée au troisième paragraphe.
Je trouve ça terrible ce que tu dis, et juste comme exemple « Déjà enlever, les deux anaphores "Dans" et "Loin" qui n'évoquent rien. "Dans" est un adverbe. Quelle est l'utilité de faire une reprise anaphorique d'un adverbe? C'est un mot sans couleurs, qui n'évoque rien. Je comprends pas cette reprise. »
C’est deux anaphores sont la structure initiale du poème ! et personnellement, ce « dans » répété ne m’a causé aucun problème, au contraire, il m’a permis d’entrer dans le poème. Et pourquoi on n’aurait pas le droit de répéter « dans » parce que c’est adverbe ? Si c’est à cause de certaines règles classiques ou qu’en sais-je, pourquoi ne pas saluer l’originalité plutôt ?
Lorsque j’ai lu ta réécriture final, je n’ai trouvé aucun respect du style de l’auteur, et la simplicité qu’il avait tenté d’amener dans son sonnet (même si à ton avis il est raté) tu l’as complètement négligée en transformant les deux premières strophes en longs couplets. Est-ce que cette solution de facilité que tu voulais éviter, tu ne viens pas de l’emprunter, en sautant dedans à pieds joints ? Il est plus facile d’exprimer une idée en quatre LIGNES qu’en quatre VERS de la taille de ceux de Shai. De plus pourquoi avoir « prosé » les deux premières strophes et pas les dernières ?

Dans la profondeur des âges, pomme d'Api, mais toujours pas pomme d'Amour. Dans les mains froides des ombres, déjà ridées. 20 ans à peine, et les éraflures de la vie. Déjà? Dans la marée grise des songes, les images des soleils bleus, des feux de camps d'automne, et Plus rien ne rayonne, tout sombre.
VS
Dans la profondeur des âges
Dans les mains froides des ombres
Dans la marée grise des songes
Plus rien ne rayonne, tout sombre.


Je ne comprends pas d’où sort le pomme d’Api. J’ai même cru que c’était pour te moquer. Je trouve amusant cette idée, à la deuxième lecture je l’ai comprise, mais ici tu rajoutes la dimension de l’amour (vue, vue, revue et rabâchée, re-rabâchée non ?) à l’enfant qui se rend compte qu’il a grandi. En quoi est-ce moins classique ? Qu’est-ce que cela apporte de plus au poème ? Est-ce que le lecteur ne peut pas chercher lui-même ce qui se cache dans une profondeur des âges ?
De même qu’est-ce que des « soleils bleus» ? qu’est-ce que ça représente ? C’est la pointe de couleur qu’il manquait ? Et pourquoi les feu de camps ? C’est ainsi que tu voudrais faire appel aux souvenirs ? Mais n’est-ce pas hyper classique aussi ? Et qui dit que Shai, s’il s’identifiait au poème, a vécu des feux de camps ?

Loin du monde indécent. Indécis, à gauche, à droite. Tout droit, c'est le cul de sac. Le cas d'école! Loin des rêves innocents: les neiges d'été et les soleil d'hiver. A s'en rendre ivre de printemps. Loin des cris d'enfant, des balbutiements d'amoureux dans les draps bleus d'amant. Ils sentent le fiel de ce qui n'est plus. Des chansons d'antan.
VS

Loin du monde indécent
Loin des rêves innocents
Loin des cris d'enfant ;
Des chansons d'antan.


« à gauche, à droite. Tout droit, c'est le cul de sac. Le cas d'école! »
Cette phrase me semble tout à fait hors contexte.
« les neiges d'été et les soleil d'hiver » facile comme double oxymore.
« des balbutiements d'amoureux dans les draps bleus d'amant. » répétition de bleus et encore une fois tu amènes la dimension de l’amour que Shai avait gardé discrète (voir inexistante dans mon interprétation). Mais c’est tes « Madelaines » je suppose.
« . Ils sentent le fiel de ce qui n'est plus. » Pourquoi du fiel ?

Plus rien dans le vestibule
des enfances. Les doux horizons.
Les errances à raison.
VS
Plus rien ne circule tout brûle.
Perdus sont les horizons
Menant à la pendaison.


Ah Shai, je viens de me rendre compte que « plus rien ne circule tout brûle » avec en plus le « annule » c’est vrai que c’est un peu lourd.
Par contre Brumepin, je ne comprends pas du tout ta strophe, je trouve l’expression « vestibule des enfances » très peu poétique, surtout que vu qu’il en sort, c’est dommage d’utiliser le mot d’une pièce où la notion d’entrer est plus importante que celle de sortir (dans mon inconscient en tout cas).
Par contre, « Menant à la pendaison » après relecture, est un vers assez difficile à comprendre aussi.

Plus rien. Ne reste que le ridicule
De ces chants. Ces rêves d'enfants
S'effilent au gré des instants présents.
VS
Plus rien ne vie, tout s'annule.
Partis sont mes rêves d'enfant,
Ils étaient mon seul présent.

Dans la version de Shai « Ils étaient mon seul présent » est quand même d’une grande force. De plus, « s’effilent au gré des instants présents » ne signifie pas du tout la même chose. Pour Shai c’est fini et les souvenirs étaient le présent. On comprend le personnage perdu. Pour toi c’est en finition, en train de se faire, et du coup il y a beaucoup moins de puissance.
En quoi les chants sont ridicules ?
Par contre je trouve le vers de Shai « Plus rien ne vie, tout s’annule. » en effet un peu dommage (notamment avec la répétition du son « ule »). J’ai longtemps cherchée par quoi remplacer, mais comme je n’arrive vraiment pas à trouver des rimes je suis désolée, je n’ai rien à proposer.

Je trouverais ça dommage que Shai abandonne son style de sonnet, car c'est en quelque sorte sa signature.

Voilà.
Ma conclusion sera : je n’ai rien contre les critiques, à condition qu’elles soient constructives et qu’elles n’impliquent que l’auteur du message. Si c’était le cas, je suis désolée, mais je n’ai vraiment pas trouvé ça clair, et, sans vouloir censurer qui que se soit, je suis persuadée qu’il y a une manière de dire les choses telle que tout le monde puisse les entendre correctement, et que nous puissions ainsi tous avancer sans pour autant se sentir gêné ou mal à l’aise face aux regards de nos (futurs) lecteurs.