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Arbre

Le Temps des Rêves

Tout ce que vous dites là me laisse plus sonnée qu'autre chose. Avalanche de scénario catastrophe, impuissance de l'individu face au groupe tout puissant dans son inconscience... Le pire, c'est de lire vos réponses, de sentir se réveiller toutes les peurs enfouies parce qu'on ne peut pas vivre au quotidien quand on commence à se laisser submerger par des pensées telles que le déchirement prochain de l'humanité, les hécatombes autour du dernier puits de pétrole, la lutte sans merci pour la vie, quitte à écraser sous son plaisir la moitié de la planète, et d'arriver trop tard pour pouvoir exprimer tout cela parce que c'est déjà fait.
Parce que le nucléaire, comme on l'a tous compris, ce n'est pas seulement une question d'énergie, une question de pour ou contre. Quand on pose cette question, on remet tout notre mode de vie sur la table et malgré ce qu'on nous enseigne en philo avec ce bien-aimé Platon : le monde est bien loin d'avoir été créé à l'image d'un autre monde supposé parfait, quasi divin.
C'est bien beau de brandir des affiches "Sortons du nucléaire", de vendre des badges et des enveloppes dans des salons écolos... Aujourd'hui, le fait d'avoir des panneaux solaires sur le toit est réservé à quelques bobos qui n'ont pas encore compris que les panneaux iront bientôt s'entasser parmi les déchets impossibles à recycler. Et puis, produire sa propre énergie relève plus du confort personnel, d'un moyen de se créer une bonne conscience, que d'une réelle démarche de protection de la planète. Monsieur X fait des économies sur sa facture d'électricité mais ne fournit pas de courant à l'industrie et encore moins aux laissés pour compte de l'autre bout du monde. Comment peut-on, chacun de nous, dire qu'on fait des efforts, quand on vit dans le tout confort, quand on gaspille l'électricité, l'eau, le gaz, qu'on prend sa voiture pour aller sauver la planète dans un potager bio ou un salon à l'extérieur de la ville ? Quand on est, comme moi et je ne pense pas être la seule, incapable de vivre au moins sans moyen de nous déplacer à l'autre bout du pays ? Comment peut-on et en même temps comment ne peut-on pas réagir ?
Je ne crois pas à la révolution totale. Ou plus exactement, je suis intimement convaincue que lorsqu'elle aura lieu, ce ne sera que pour amener au pouvoir une nouvelle génération de consommateurs effrénés qui se diront défenseurs des intérêts des anciens brimés. Le "Sud" est entrain de renverser la vapeur mais dans tous les cas, cela ne passera pas par une remise en question à la lumière de l'expériences du vieux "Nord" qui s'essouffle.
Alors oui, je suis pour qu'on change de vie, que le nucléaire puisse être abandonné grâce à un effort commun et un retour à une vie moins effrénée. Mais une simple remarque : sur quel support sommes-nous entrain de discuter ? Nous avons besoin du confort fourni par les sources d'énergie polluantes pour nous dresser contre elles. Alors, je rejoins tout de même Nani, parce que c'est le seul moyen de ne pas aller directement rendre son corps à la biomasse ou tomber dans la culpabilité mais pour moi, il s'agit tout simplement d'un problème insolvable. (C'est toujours aussi optimiste, je sais.)