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Arbre

Le Temps des Rêves

Putain. Louise !
Cette fille, elle est entrée comme un ouragan par la fenêtre bleue, entre deux urgences. Elle n'a même pas frappé. Elle avait un chapeau rouge, des boucles d'oreille rondes, des paillettes rousses sur les joues et des chaussettes à pois. Elle m'a demandé si je connaissais des endroits où jouer sur Paris et puis elle a disparu. Moi, je me suis retrouvée avec sa voix, son corps, ses mots et à peine trente secondes pour en faire le tour. C'était une sacré balade, un sacré voyage sur place. Il y a peu de gens à m'avoir fait cet effet-là. Mon agenda était plein comme un œuf et j'étais déjà prête à la faire entrer dedans avec son visage rond et son sac à dos. En tassant un peu, ça devait pouvoir le faire. Y'avait une place dans mon lit pour dépanner, au besoin. Et y'avait ptêtre même une place dans ma vie. Là, par contre, tasser ne suffirait pas. Il faudrait faire le vide.
Elle est revenue plusieurs fois. Elle disait toujours les mêmes mots. Elle avait toujours le même chapeau. Assise sur mon bureau, elle ne décrochait pas ses yeux des miens. Moi, pareil. Des fois, elle changeait de boucles d'oreilles. Des fois elle était nue. Des fois elle se roulait par terre. Des fois elle se cachait derrière un poisson rouge.
La dernière fois qu'elle est venue, elle m'a juste dit pardon.
Elle ne reviendrait pas.
Elle partait pour Berlin.
Elle était devenue toute petite dans son T-shirt jaune.