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Arbre

Le Temps des Rêves

Bruyant le soir est sans lune
De tristes bourrasques souffle l’autan d'août
Que j’entends s’acharner sur les branches voûtées
De l’Irlandaise campagne où gisent mes pieds nus

Contre la froide vitre depuis la brune
Mon front s’appuie comme on chasse les maux
Au-dedans de moi-même j'aperçois la tourmente
Laisser comme le ciel une traîne noir d’encre

Détrônez Mélancors
Assis élégant dans sa cage de verre
Détrônez Mélancors
Baigné d’ondes rouges dans sa cage de verre
Détrônez donc cet homme
Dont la chemise m’aveugle de ses rayons verts



Ce soir-là de l’autre coté de la Manche
S’y résolut mon père
Avec la même tendresse qu’infusait Mamgoz
Dans nos tasses de tilleul aux couchers des fest-noz

Par de sages murmures il fit fuir Mélancors
Loin du poste vieilli qu'enfiévrait un dialogue
Où se chevauchent inspirés quatre mains deux pianistes
Dans l’immense euphorie des harmonies brûlantes :
Nuances classiques
Accents latins
Le jazz passionné s’enamoure sans fin

Piquées Frappées Pincées
Et de couleurs épicées
Ces impros exquises !

Et de sueur perlés leurs cils éperdument brillent
Dans les feux scintillants des regards rieurs

A l’ardente radio je reste vissée
Et le temps suspendu répand en frissons
Son virtuose nectar à l’exorciste fusion

Détrôné Mélancors
A présent pantelant dans la cage de verre
Détrôné Mélancors
Jadis d’ondes rouges aux voilages d’hiver
Détrôné le fou
Dont la chemise pendouille dans la cage de verre



Dans le soir dépourvu du croissant de phosphore
Tombe la pluie en trombes délicieusement
Ivres sous les rafales de l’autan d'août
Que je sens emporter les vertes cendres folles

Et moi - dans un gros pull emmitouflée
J'écoute le dernier friselis
De ce qu’il reste d’un homme
D’une mélancolie
Qui maintenant
S’envole

L.Mc'h