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Arbre

Le Temps des Rêves

Né avant le monde
Et la glaise
Nous te croyons innocent
Mais ta puissance est sans égal

Tu as connu toutes nos nuits,
Tu te plies, te délies
Tu t'enveloppes et te cambres
Tu portes le chant des insoumis

Et parfois de ton néant
Naît le visible
L'insoutenable énergie
D'une voix oubliée

La litanie perdue de l'air

Bris et fracas
De ton haleine sur la Terre
De ton âme qui tournoie
Dans le creux du monde

Contre l'écorce tu échoues
Dans les branchages tu chavires
Sur l'herbe tu te noies
Et dans mes yeux tu délires

Tu es le vent
Qui a connu trop de saisons
Ton souffle s'est perdu
Dans la haine

Mais la danseuse sait parler aux ouragans
Leur redonner une force
Un vortex bienfaisant
Qui élève le monde

Il s'agit d'un mouvement
Qui part du centre de l'arbre
Du ventre de la femme
De la terre profonde

La petite silhouette
Est apparue au cœur des éléments
Elle vibre
Elle se tend

Ses pieds loins dans la boue
Ses bras s'étirent dans la tourmente
Les paupières closes
Elle est l'œil d'une force démente

Ses doigts se tordent
Son bassin s'arque
Et elle décroche son âme
Qui se dissout dans la spirale

Elle est l'ouragan
Soudain imperceptible
Qui offre ses débris
A la terre ravagée

Son corps, alors
Devient mouvement
Grave et gracieux
Amoureux

L'Ouragan rejoint la lumière
La danseuse se dissout
Dans une arabesque
Enfin libérée

Sous son dernier pas,
Un arbre a poussé.